Abus de minorité dans la franchise participative
vendredi 15 avril 2022

Abus de minorité dans la franchise participative

Une participation minoritaire d’un réseau dans le capital d’un franchisé ne permet pas de ne voter que dans son seul intérêt. 

La franchise participative, ou franchise capitalistique, consiste pour un réseau à prendre une participation au sein du capital de ses franchisés. Cela peut notamment permettre au réseau d’apporter un complément financier nécessaire au franchisé pour boucler le financement des investissements requis. Toutefois, il convient de prendre garde à ce que cette participation ne soit pas utilisée de manière abusive. C’est ce qu’illustre cet arrêt de la cour d’appel de Caen.

En l’espèce, un couple avait constitué une société destinée à l’exploitation d’une superette sous une enseigne appartenant au groupe Carrefour. Une société du groupe du franchiseur avait pris une participation de 26% au capital, lui conférant une minorité de blocage sur les décisions de nature extraordinaires. La société franchisée, dont l’objet était l’exploitation d’une supérette spécifiquement sous une des enseignes du groupe Carrefour avait conclu un contrat de location-gérance portant sur le fonds de commerce, un contrat de franchise et un contrat d’approvisionnement. 

Finalement mécontent de l’exploitation, le franchisé résilie les contrats le liant à l’enseigne. Il convoque ensuite une assemblée générale comportant notamment à son ordre du jour la modification de l’objet social de la société, afin que celui-ci ne soit plus limité à l’exploitation d’une enseigne du groupe de son ancien franchiseur. La société du groupe Carrefour actionnaire minoritaire s’oppose à cette résolution. Le franchisé, considérant qu’il s’agit d’un abus de minorité, sollicite du tribunal la désignation d’un mandataire ad hoc chargé de voter en lieu et place de l’associé minoritaire.

L’abus de minorité consiste pour un associé minoritaire à s’opposer, de manière contraire à l’intérêt social, à une décision essentielle pour la société, dans « l’unique dessein de favoriser ses propres intérêts au détriment de l’ensemble des autres associés ». 

Si la cour d’appel n’a pas considéré qu’il y avait abus de minorité à refuser de voter en faveur d’un investissement significatif dès lors que l’associé n’avait pas reçu les éléments permettant de se prononcer, elle a considéré que le refus de changement d’objet social constituait bien un abus de minorité.

La cour indique en premier lieu que le changement d’objet social était essentiel pour permettre à la société d’exercer son activité, l’impossibilité d’exercer son activité étant contraire à l’intérêt social. Or, l’objet social de la société, en limitant l’exploitation à une enseigne spécifique du groupe du minoritaire, empêchait toute autre exploitation.

Elle indique en deuxième lieu que « le refus de vote de la modification statutaire (…) ne s’explique que par sa volonté de préserver le système de franchise participative, pourtant régulièrement dénoncé, et ne répond qu’à la défense de ses intérêts personnels, lesquels se confondent avec ceux de la société Carrefour Proximité France ». Les conditions de l’abus de minorité sont donc remplies.

Cet arrêt rappelle que si la franchise participative peut être un schéma intéressant, elle ne doit pas être utilisée dans le seul intérêt du franchiseur. La société franchisée a son propre intérêt social, qui ne se confond pas avec celui d’un seul de ses associés. Plus généralement, il convient de garder à l’esprit que le franchisé est un commerçant indépendant et que le mécanisme de la franchise participative ne doit pas le remettre en cause. L’abus de minorité ne doit d’ailleurs pas être le seul risque auquel il convient de prendre garde : la franchise participative ne doit pas donner lieu à une immixtion dans la gestion, à un lien de subordination, ni être un moyen de porter atteinte à la liberté du franchisé de ne plus faire partie d’un réseau au terme de ses engagements contractuels avec celui-ci. La rédaction des actes sociétaires (statuts et pactes d’actionnaires) et leur articulation avec le contrat de distribution nécessite donc une certaine vigilance. 

CA Caen, 2e ch. civ., 20 janvier 2022, n°21/01013

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