Contrats de distribution, réforme du règlement européen d'exemption des ententes verticales
Le projet de nouveau règlement européen d'exemption des ententes verticales a été publié le 9 juillet. Il apporte des modifications significatives au règlement actuel, que les enseignes vont devoir prendre en compte pour la rédaction de leurs contrats de distribution. Nous vous en proposons un premier commentaire synthétique.
Le 9 juillet, la Commission européenne a publié son projet de règlement d’exemption concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées , destiné à remplacer le Règlement 330/2010. Elle a publié également un projet de lignes directrices, qui existe à présent en français.
Ces projets sont ouverts à la consultation publique. La Commission y propose des modifications, destinées à remédier aux problèmes mis en évidence dans l’évaluation présentée dans le document de travail des services de la Commission publié le 8 septembre 2020 (Voir le document de travail des services de la Commission intitulé «Évaluation du règlement d’exemption par catégorie applicable aux accords verticaux», SWD(2020) 172 final).
Selon la note explicative de la Commission, les modifications ont trois objectifs : réajuster la zone de sécurité afin d’éliminer les faux positifs et de réduire les faux négatifs dans le cadre du règlement d’exemption ; fournir aux parties prenantes des orientations actualisées face à un environnement des entreprises remodelé par la croissance du commerce électronique et des plateformes en ligne, et garantir une application plus harmonisée des règles verticales dans l’ensemble de l’Union européenne; et réduire les coûts de mise en conformité pour les entreprises en introduisant des simplifications dans les domaines où les règles actuelles sont complexes, et en rationalisant les orientations existantes.
Nous insisterons ici sur les modifications de ce que la Commission appelle « la zone de sécurité du règlement d’exemption » (I), puis sur l’adaptation à l’économie en ligne (II).
I/ les nouveaux contours de la « zone de sécurité » du projet de règlement d’exemption révisé
Dans le but de réduire les cas où l’exemption ne devrait pas être accordée (faux positifs) et ceux où elle devrait l’être mais ne l’est pas (les faux négatifs), les modifications suivantes sont proposées par le Commission.
1/ La double distribution
La double distribution désigne les situations dans lesquelles un fournisseur vend ses produits ou services non seulement par l’intermédiaire de distributeurs indépendants, mais aussi directement aux clients finals, en concurrence directe avec ses distributeurs indépendants. Elle s’est considérablement développée, du fait notamment de la croissance du commerce en ligne, et peut poser des problèmes horizontaux non négligeables.
Les lignes directrices précisent que la notion d’accord de double distribution « devrait faire l’objet d’une interprétation étroite, en raison de la nature exceptionnelle de cette disposition » (§87).
Dans le régime actuel, les cas de double distribution peuvent être exemptés à supposer que la condition de parts de marché posée par le Règlement 330/2010 soit respectée (parts de marché inférieures à 30%). Dans le projet de règlement révisé, l’exemption ne sera accordée dans ce cas, que de manière bien plus restreinte.
En supposant que les accords verticaux de double distribution ne comportent :
- aucune restriction par l’objet au sens de l’article 101, paragraphe 1, du traité, (cf article 2§6 : « Les exceptions prévues à l’article 2, paragraphe 4, points a) et b), et à l’article 2, paragraphe5, ne s’appliquent pas aux accords verticaux qui, directement ou indirectement, isolément ou cumulés avec d’autres facteurs sur lesquels les parties peuvent influer, ont pour objet de restreindre la concurrence entre le fournisseur concurrent et l’acheteur ». )
- ni aucune restriction caractérisée au sens de l’article 4 du règlement d’exemption révisé,
ces accords vont être soumis à des conditions de parts de marché spécifiques :
a/ exemption en dessous de 10 % de part de marché cumulée sur le marché de détail
L’idée principale est de limiter l’exemption en cas de double distribution, aux cas où la part de marché cumulée des parties sur le marché de détail ne dépasse pas 10 %, en conformité avec le seuil de part de marché existant prévu par la communication de minimis pour les accords entre concurrents.
C’est pourquoi l’article 2§4 prévoit d’abord que:
« L’exemption prévue au paragraphe 1 ne s’applique pas aux accords verticaux conclus entre entreprises concurrentes. … »
Puis le texte ajoute :
« …En revanche, elle s’applique à tous les aspects d’un accord vertical non réciproque entre entreprises concurrentes si:
(a) le fournisseur est un producteur, un grossiste ou un importateur et un distributeur de biens, tandis que l’acheteur est un distributeur et non une entreprise concurrente qui fabrique, vend en gros ou importe et que sa part de marché cumulée sur le marché de vente au détail concerné ne dépasse pas [10] %; ou
(b) le fournisseur est un prestataire de services à plusieurs niveaux d’activité commerciale, tandis que l’acheteur fournit ses services au stade de la vente au détail et n’est pas une entreprise concurrente au niveau de l’activité commerciale où il achète les services contractuels et que sa part de marché cumulée sur le marché de vente au détail concerné ne dépasse pas [10] %. »
Les lignes directrices expliquent que « L’exception prévue à l’article 2, paragraphe 4, point a), du règlement d’exemption concerne les situations dans lesquelles le fournisseur est un fabricant, un grossiste ou un importateur et est également un distributeur de biens, tandis que l’acheteur n’est qu’un distributeur qui n’est pas en concurrence avec le fabricant en amont » (§88).
On remarque que le « a » étend le champ d’application de l’exception concernant la double distribution aux grossistes et aux importateurs.
Mais l’article 2§7 exclut du bénéfice de cette exception les fournisseurs de services d’intermédiation en ligne dès lors que ceux-ci exercent une fonction hybride, c’est-à-dire qu’ils vendent des biens ou des services en concurrence avec des entreprises auxquelles ils fournissent des services d’intermédiation en ligne (comme par exemple Amazon, Google, etc).
Les lignes directrices prévoient encore que « L’exception prévue par l’article 2, paragraphe 4, point b), du règlement d’exemption concerne les situations dans lesquelles le fournisseur est un fournisseur de services qui opère à plusieurs niveaux d’activité commerciale, tandis que l’acheteur n’opère qu’au stade de la vente au détail et n’est pas en concurrence avec le fournisseur au niveau de l’activité commerciale où il achète les services contractuels » (§89).
b/ Exemption sauf pour les échanges d’information, entre 10 et 30%
Pour les situations de double distribution dans lesquelles la part de marché cumulée du fournisseur et de ses distributeurs au niveau du marché de détail est supérieure à 10 % mais ne dépasse pas le seuil de part de marché de 30 % prévu à l’article 3 du règlement d’exemption, l’accord vertical demeure exempté à tous égards, sauf en ce qui concerne les échanges d’information entre les parties à l’accord vertical (Article 2 §5).
Article 2§5/ « Si la part de marché cumulée du fournisseur concurrent et de l’acheteur mentionnés à l’article 2, paragraphe 4, point a) ou b) dépasse [10] % sur le marché de vente au détail concerné, mais ne dépasse pas les seuils de part de marché établis à l’article 3, l’exemption prévue au paragraphe 1 s’applique, sauf en ce qui concerne tout échange d’informations entre les parties, qui doit être évalué selon les règles applicables aux accords horizontaux ».
Dans une position déjà un peu ancienne, la FFF s’est prononcée contre cette solution nouvelle concernant les accords de double distribution, et en faveur du maintien de l’exemption de la double distribution. Elle a précisé « qu’en raison de la nature du contrat de franchise, les ventes opérées directement par le franchiseur via ses propres points de vente (succursales) ou, le cas échéant, par internet ou par un autre mode de vente (digital, courrier, téléphone, ...), et celles effectuées par ses franchisés ne relèvent en aucun cas du mécanisme de « double distribution » tel que défini dans les Lignes Directrices » (Position Vber de la FFF du 20 novembre 2020).
Cela est loin d’être acquis dans la version actuelle du projet de règlement et de lignes directrices. La franchise devra s’adapter au cas où la double distribution ne bénéficierait plus sauf exceptions de l’exemption.
2/ Les clauses de parité
Il s’agit des clauses qui imposent à une entreprise d’offrir à son contractant les mêmes conditions ou des conditions meilleures que celles qu’elle offre sur n’importe quel autre canal de vente/de commercialisation (par exemple d’autres plateformes) ou sur son propre canal de vente directe [par exemple son (ses) site(s) web].
Ces clauses sont aujourd’hui exemptées par le règlement 330/2010, et ne peuvent finalement être appréhendées que si l’un des acteurs a une part de marché supérieure à 30% ou si l’un des acteurs est en position dominante (affaire Booking).
Le projet de règlement d’exemption révisé supprime le bénéfice de l’exemption par catégorie pour les obligations de parité entre plateformes pour la vente au détail, qui sont imposées par des fournisseurs de services d’intermédiation en ligne.
L’article 5 d en fait un cas de restrictions exclues :
« §1/ L’exemption prévue à l’article 2 ne s’applique pas aux obligations suivantes contenues dans des accords verticaux: (…)
d/ toute obligation directe ou indirecte interdisant à un acheteur de services d’intermédiation en ligne d’offrir, de vendre ou de revendre des biens ou des services à des utilisateurs finals à des conditions plus favorables en utilisant des services d’intermédiation en ligne concurrents ».
Finalement, ce type d’obligation de parité devrait dorénavant faire l’objet d’une appréciation au cas par cas au regard de l’article 101 du traité, puisqu’il ne bénéficiera pas de l’exemption, sans pour autant priver le reste de l’accord de l’exemption.
A noter : le projet de règlement d’exemption révisé accorde toujours le bénéfice de l’exemption par catégorie aux obligations de parité relatives aux canaux de vente directe ou de commercialisation directe (parité dite restreinte), dès lors que les autres conditions de l’exemption sont réunies (notamment le seuil de part de marché de 30 %)
3/ Les restrictions des ventes actives
Le règlement d’exemption actuel autorise les restrictions aux ventes actives dans les réseaux de distribution, comme la franchise.
Mais lors de l’évaluation du règlement, il a été indiqué que ces règles manquaient de clarté et limitaient la faculté des fournisseurs de déterminer leurs systèmes de distribution selon leurs besoins commerciaux.
Pour plus de clarté, l’article 1 §1 n/ précise d’abord ce qu’il faut entendre par restrictions aux vents actives ou passives. Ce texte définit surtout les restrictions aux ventes en ligne. On le retrouvera plus loin. Par ailleurs, il est proposé de modifier les règles relatives aux restrictions des ventes actives et ce, principalement à l’article 4, paragraphes b) à d), comme suit.
a/ Possibilité d’une exclusivité partagée
En premier lieu, l’article 4, point b), introduit la possibilité d’une exclusivité partagée, permettant à un fournisseur de désigner plusieurs distributeurs exclusifs sur un territoire donné ou pour une clientèle donnée. En outre, pour ne pas porter atteinte à l’efficacité du système de distribution exclusive , le projet de lignes directrices révisées sur les restrictions verticales précise que le nombre de distributeurs désignés doit être déterminé au prorata du territoire ou de la clientèle alloué de manière à garantir un certain volume d’activités qui préserve leurs efforts d’investissement.
Ce texte pourra s’appliquer à la franchise. Le § 151 des lignes directrices précise en effet que « …Les restrictions verticales incluses dans les accords de franchise seront évaluées au regard des règles applicables au système de distribution le plus proche de la nature de l’accord de franchise en question. Par exemple, un accord de franchise qui donne lieu à un réseau fermé, compte tenu de l’interdiction faite aux membres de vendre à des non-membres, sera évalué au regard des règles applicables à la distribution sélective. En revanche, un accord de franchise accordant une exclusivité territoriale et une protection contre les ventes actives par d’autres franchisés sera évalué au regard des règles applicables à la distribution exclusive ».
(On note dans ce passage qu’un contrat de franchise pourrait comporter une clause d’étanchéité et se rapprocher plutôt de la distribution sélective).
Le projet de règlement révisé est ensuite rédigé d’une manière assez peu lisible.
Le principe est que l’exemption ne s’applique pas en cas de restrictions aux ventes actives ou passives (Art 4 b/ : « L’exemption prévue à l’article 2 ne s’applique pas aux accords verticaux qui, (…) ont pour objet: (…) b/si le fournisseur exploite un réseau de distribution exclusive, de restreindre le territoire sur lequel, ou les clientèles auxquelles, un acheteur ou un nombre restreint d’acheteurs, auquel un territoire ou une clientèle a été exclusivement alloué, peut vendre activement ou passivement les biens ou services contractuels… »
Ce principe comporte des exceptions (donc des cas où l’exemption s’applique), et notamment le cas de l’exclusivité partagée:
« sauf s’il s’agit de : (…) (i) la restriction des ventes actives du distributeur exclusif ou du distributeur exclusif et de ses clients qui ont conclu un accord de distribution avec le fournisseur (…) sur un territoire ou à une clientèle que le fournisseur (…) a alloués exclusivement à un acheteur ou à un nombre limité d’autres acheteurs ».
Mais il est précisé au §102 des lignes directrices : « …Il y a donc lieu de déterminer le nombre de distributeurs désignés proportionnellement au territoire ou à la clientèle alloués de manière à garantir un certain volume d’activité préservant leurs efforts d’investissement ».
b/ Possibilité d’imposer à l’acheteur de répercuter la restriction sur ses clients
En deuxième lieu, pour renforcer la protection de l’incitation des distributeurs exclusifs à investir, le projet de règlement révisé permet au fournisseur d’imposer à ses acheteurs de de répercuter la restriction sur leurs clients.
Conformément à l’article 4, point b), du projet de règlement d’exemption révisé, une telle répercussion est possible lorsque le client de l’acheteur a conclu un accord de distribution avec le fournisseur ou avec une partie à laquelle celui-ci a accordé des droits de distribution.
« L’exemption (…) ne s’applique pas (…) sauf si :
(b) (…) i) la restriction des ventes actives du distributeur exclusif ou du distributeur exclusif et de ses clients qui ont conclu un accord de distribution avec le fournisseur ou avec une partie qui a obtenu des droits de distribution du fournisseur, sur un territoire ou à une clientèle que le fournisseur s’est réservés ou qu’il a alloués exclusivement à un acheteur ou à un nombre limité d’autres acheteurs ».
c/ Protection renforcée de la distribution sélective
En troisième lieu, l’article 4, point c), du projet de règlement d’exemption révisé accorde aux systèmes de distribution sélective une protection légèrement renforcée contre les ventes de distributeurs non autorisés situés sur le territoire auquel s’étend la distribution sélective.
On regrettera qu’il y ait toujours l’exigence maladroite que les « distributeurs non agréés » soient « situés sur le territoire du système de distribution sélective », alors que le seul point essentiel est que la clause d’étanchéité puisse interdire de vendre à des « distributeurs non agréés » s’ils revendent « sur le territoire du système de distribution sélective ». Comme il y aura toujours un territoire dans le monde non couvert par le système de distribution sélective, il suffit de s’y installer, puis de commander en ligne des produits aux distributeurs sélectifs, et de les revendre en ligne aux clients situés sur le territoire couvert par la distribution sélective, pour contourner la protection.
Au demeurant, la jurisprudence semble plus souple sur cette question. Sans se référer à un règlement d’exemption, la Cour d’appel de renvoi dans l’affaire France Télévision c Coty valide la clause d’étanchéité « peu important que cette interdiction de revendre à des distributeurs non agrées soit indépendante du territoire sur lequel ils sont établis » (cf CA Paris 9 juin 2021 RG 18-17379).
4/ les mesures indirectes restreignant les ventes en ligne
L’évaluation du règlement 330/2010 a montré que les ventes en ligne se sont érigées en un canal de vente performant, de sorte qu’il ne paraît plus nécessaire de les protéger en qualifiant ab initio de restrictions caractérisées certaines mesures indirectes restreignant les ventes en ligne.
a/ le double prix
Le système de double prix consiste à appliquer à un même distributeur un prix de gros plus élevé pour les produits destinés à être revendus en ligne que pour les produits revendus hors ligne.
Il ne faut pas confondre cette situation avec celle où dans des conditions catégorielles, le fournisseur vend à un certain prix à ses distributeurs pure players, et à un autre prix à ses distributeurs physiques. (qui peuvent vendre par Internet ou dans le monde physique). Ceci était déjà licite.
Dans le système du double prix, le prix est différent en fonction du mode de revente (par Internet ou non).
Dans le règlement actuel, le double prix était une restriction caractérisée, car il était une entrave au commerce en ligne, que la Commission considérait comme une restriction aux ventes passives, sauf si le fournisseur établissait qu’il avait plus de frais de service après-vente en cas de revente en ligne.
L’article 4 du projet de règlement d’exemption révisé ne qualifie pas le système de double prix de restriction caractérisée.
Les lignes directrices apportent des précisions (§195), desquelles il résulte :
- Qu’il est permis aux fournisseurs de fixer des prix de gros différents pour les reventes en ligne et hors ligne d’un même distributeur, dans la mesure où cela vise à encourager ou à récompenser un niveau d’investissement adéquat, et est en rapport avec les coûts liés à chaque canal.
- Qu’en revanche, un système de double prix ne sera pas exempté, s’il a directement ou indirectement, pour objet d’empêcher les acheteurs ou leurs clients d’utiliser l’internet pour vendre leurs biens ou services en ligne car il sera qualifié de restriction caractérisée.
Il en résulte certes une différence par rapport au système actuel :
- Aujourd’hui, les frais occasionnés au fournisseur par une revente en ligne peuvent justifier le double prix
- Avec le règlement révisé, ce sont les différents coûts et investissements supportés par un distributeur hybride, qui vont justifier le double prix.
Cela semble ne s’appliquer qu’au double prix réalisé à l’égard d’un même acheteur qualifié d’hybride (click & mortar).
Il en résulte tout de même que la sécurité juridique conférée par le règlement révisé, sera fragilisée, puisqu’il faudra apprécier si ce système de double prix avait ou non cet objet d’empêcher les acheteurs ou leurs clients d’utiliser l’internet pour vendre leurs biens ou services en ligne, ou était justifié par les coûts et investissements supportés par le distributeur hybride.
Il n’est pas sûr qu’il faille conseiller l’utilisation du double prix qui crée tant d’incertitudes.
b/ L’équivalence entre la vente en ligne et la vente physique abandonnée
Le principe d’équivalence consiste à exiger que ce soit imposé aux ventes en ligne des critères globalement équivalents à ceux imposés aux points de vente physique.
Ce principe est abandonné dans le cadre d’un système de distribution sélective : les critères imposés par les fournisseurs pour les ventes en ligne ne doivent plus nécessairement être globalement équivalents à ceux imposés aux points de vente physique, ces deux canaux étant de nature intrinsèquement différente.
Il reste néanmoins, comme pour le double prix, que choisir des critères très différents pour la vente en ligne que ceux applicables à la vente physique ne sera pas exempté, s’il a directement ou indirectement, pour objet d’empêcher les acheteurs ou leurs clients d’utiliser l’internet pour vendre leurs biens ou services en ligne (cf note explicative de la Commission).
II/ Adaptation à un environnement remodelé par la croissance d u commerce électronique et des plateformes en ligne
1/ Les restrictions en ligne
Le projet de règlement d’exemption révisé et le projet de lignes directrices révisées sur les restrictions verticales intègrent les principes directeurs de l’appréciation des restrictions en ligne, principes qui ont été tirés de la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE, notamment dans les affaires Pierre Fabre et Coty , et sur lesquels s’appuie la DG COMP
Tout d’abord, les restrictions qui, directement ou indirectement, isolément ou cumulées avec d’autres facteurs, ont pour objet d’empêcher les acheteurs ou leurs clients d’utiliser l’internet de manière effective pour vendre leurs biens ou services en ligne, ou d’utiliser de manière effective un ou plusieurs canaux publicitaires en ligne, sont définies comme constitutives de restrictions des ventes actives ou passives, et donc de restrictions caractérisées au sens de l’article 4 du règlement d’exemption.
Art 1 §1 n : «restriction des ventes actives ou passives»: (…) En ce qui concerne la vente de biens et de services en ligne, une restriction qui, directement ou indirectement, isolément ou cumulée avec d’autres facteurs, a pour objet d’empêcher les acheteurs ou leurs clients d’utiliser de manière effective l’internet pour vendre leurs biens ou services en ligne ou d’utiliser de manière effective un ou plusieurs canaux publicitaires en ligne constitue une restriction des ventes actives ou passives, qui, directement ou indirectement, isolément ou cumulée avec d’autres facteurs sur lesquels l’une ou l’autre des parties peut influer, a pour objet de restreindre le territoire sur lequel, ou le groupe de clients auquel, les acheteurs peuvent vendre les biens ou les services contractuels ou, dans le cas de la distribution sélective, de restreindre les ventes actives ou passives aux utilisateurs finals par les membres du système de distribution sélective qui opèrent en tant que détaillants sur le marché ».
La distribution par Internet intègre par ce biais le règlement, alors qu’elle n’était réglée jusqu’alors qu’au travers des lignes directrices.
La section 6.1.2 du projet de lignes directrices révisées sur les restrictions verticales fournit des orientations supplémentaires sur ces restrictions caractérisées. Par exemple, est une vente passive, l’exploitation d’un site web ; est une vente active, le fait de traduire un site web dans une langue qui n’est pas utilisée couramment sur le territoire du distributeur.
Une restriction du recours à des sites web de comparaison de prix, ou au référencement payant sur des moteurs de recherche, est assimilable à une restriction caractérisée au sens du règlement d’exemption; en effet, le recours à la publicité permet au distributeur d’attirer des clients potentiels sur son site, ce qui est une condition préalable à toute vente en ligne.
À l’inverse, les restrictions de la publicité en ligne qui n’excluent pas spécifiquement certains canaux de publicité en ligne bénéficient de l’exemption par catégorie puisqu’il s’agit de restrictions qui sont liées au contenu de la publicité en ligne ou qui fixent certaines normes de qualité.
Les autres actualisations dans le cadre du projet de lignes directrices révisées sur les restrictions verticales comprennent l’introduction d’une section consacrée aux restrictions du recours aux plateformes en ligne et aux outils de comparaison des prix (voir les sections 8.2.3 et 8.2.4).
Notamment, s’agissant des places de marché, la Commission reconnaît, comme en droit positif, que la une restriction des ventes sur les places de marché en ligne incluse dans un accord vertical est exemptée au titre du règlement d’exemption lorsque les parts de marché du fournisseur et de l’acheteur n’excèdent pas chacune 30 % et que l’accord vertical ne comporte aucune restriction caractérisée au titre du règlement d’exemption et aucune restriction exclue au titre du règlement d’exemption ne pouvant être dissociée du reste de l’accord vertical. Bien qu’elle limite l’utilisation d’un canal en ligne spécifique, d’autres canaux en ligne restent à la disposition de l’acheteur : « une restriction de l’utilisation des places de marché en ligne peut généralement bénéficier de la zone de sécurité prévue par le règlement d’exemption » (§317)
Toutefois, illustrant des hypothèses en matière de distribution sélective, le § 319 admet que « lorsqu’un fournisseur inclut l’opérateur d’une place de marché en ligne en tant que distributeur agréé dans son système de distribution sélective, ou lorsqu’il restreint l’utilisation des places de marché en ligne par certains distributeurs agréés mais pas par d’autres, ou encore lorsqu’il restreint l’utilisation d’une place de marché en ligne, mais utilise lui-même cette place de marché pour distribuer les biens ou services contractuels, il y a peu de chances que les restrictions de l’utilisation de ces places de marché en ligne satisfassent aux conditions relatives au caractère approprié et à la nécessité ».
Cette précision est heureuse, car l’image de marque d’un produit ne nécessite pas qu’il ne soit pas vendu sur une place de marché, quand le fournisseur vend lui-même ledit produit sur cette place !
2/ l’économie des plateformes
L’article 1, paragraphe 1, point d), du projet de règlement d’exemption révisé fournit une définition de la notion de fournisseur de services d’intermédiation en ligne, qui est fondée sur une définition similaire du règlement P to B sur les relations entre les plateformes et les entreprises.
Cette définition précise que les fournisseurs de services d’intermédiation en ligne sont considérés comme des fournisseurs au sens du règlement d’exemption.
La section 4.3 des lignes directrices explicite les conséquences de cette précision et de l’application d’un certain nombre d’autres règles aux fournisseurs de services d’intermédiation en ligne. La section 3.2.3 des lignes directrices explique également pourquoi les entreprises exerçant leurs activités dans l’économie des plateformes en ligne ne peuvent pas être considérées comme des agents à proprement parler.
En outre, comme mentionné ci-dessus dans le contexte des modifications qu’il est proposé d’apporter à l’exception concernant la double distribution, l’article 2, paragraphe 7, du projet de règlement d’exception révisé prévoit que les fournisseurs hybrides de services d’intermédiation en ligne ne bénéficient pas de l’exemption. Il s’agit de ceux qui vendent des biens ou des services en concurrence avec des entreprises auxquelles ils fournissent des services d’intermédiation en ligne (comme par exemple Amazon, Google, etc).
Pour la Commission, ceci est cohérent avec le projet de DMA (proposition de législation sur les marchés numériques) (Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique (législation sur les marchés numériques) {SEC(2020) 437 final} - {SWD(2020)363final}-{SWD(2020)364final}.
Une des raisons à cela est que le DMA met l’accent sur les contrôleurs d’accès numériques (les gatekeepers), qui sont des entreprises disposant d’un pouvoir de marché et ne bénéficient donc pas de l’exemption.
Pour finir avec cette présentation succincte (le projet de règlement fait 13 pages, mais les lignes directrices en font 111), il faut noter que les dites lignes directrices révisées visent à renforcer autant que possible, dans les limites du cadre juridique existant, la faculté qu’ont les autorités nationales de concurrence de retirer le bénéfice du règlement d’exception dans des cas particuliers, et ce, en fournissant des orientations sur les conditions et la procédure applicables (voir la section 7.1 du projet de lignes directrices révisées sur les restrictions verticales).
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