lundi 27 juin 2016

TDF condamnée à 20,6 millions d’euros par l’Autorité de la concurrence pour abus de position dominante

L’Autorité de la concurrence prononce une sanction de 20,6 millions d'euros à l'encontre de la société TDF pour être intervenue abusivement auprès des communes afin de gêner l'implantation de ses concurrents et pour avoir mis en place un système de remises fidélisantes incitant les chaînes de télévision à recourir aux services de la société TDF pour l'essentiel de leurs besoins.

Le 22 septembre 2009, la société Itas Tim a saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société TDF et contraires aux articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Anciennement titulaire d’un monopole d’état, la société TDF détenait une part de marché supérieure à 80% sur l’ensemble du marché de la diffusion de la TNT. Les sociétés Towerecast, Onecast et Itas Tim sont ses principaux concurrents.

La société Itas Tim reprochait plus particulièrement à la société TDF de s’opposer à l’implantation d’infrastructures concurrentes à proximité de ses propres terrains et de lui refuser l’accès à ses terrains afin d’y installer ses propres infrastructures.

Sur les pratiques reprochées :

1.    La société TDF est intervenue auprès des collectivités locales pour les dissuader d'autoriser l'implantation de sites de diffusion concurrents à proximité de ses propres installations.

A l'occasion du déploiement de la TNT sur la plaque Alsace, première région concernée par le passage au tout numérique numérique, la société TDF a adressé, en juillet 2009, à la quasi-totalité des communes de la plaque, un courriel leur demandant, en cas d'installation d'un pylône concurrent à proximité de ses installations, de l’aviser afin d’anticiper toute perturbation radioélectrique.

Ce courriel a été adressé concomitamment au lancement des appels d’offres des éditeurs audiovisuels, c’est-à-dire au moment où les diffuseurs, choisissant leurs propres pylônes, devaient préparer leurs offres pour les éditeurs audiovisuels et dépendaient donc des décisions des communes sur les projets d’implantation d’infrastructures concurrentes à celles de la société TDF.

Par ailleurs, dans la cadre de l’instruction de déclarations préalables par les collectivités locales, la société TDF a rendu à plusieurs reprises des avis négatifs à l'implantation de pylônes concurrents au motif de risques de perturbations radioélectriques, et sans alerter les collectivités sur le fait qu’elles ne pouvaient plus la solliciter en qualité d’organisme public.
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2.    Elle a également mis en place plusieurs remises fidélisantes destinées à inciter fortement les éditeurs de chaînes de télévision, réunis en multiplex, de recourir aux services de la société TDF pour l'essentiel de leurs besoins de diffusion :

-    une remise variant entre 3% et 23 % liée au nombre de sites de la société TDF que chaque multiplex sélectionne à l’intérieur de zones géographiques délimitée par la société TDF pour chaque appel d’offres : plus le nombre de sites confiés à la société TDF est important, plus le pourcentage de remise est élevé. Quel que soit le taux retenu, la remise n’est accordée que si une part substantielle des sites, presque toujours supérieure à 70 %, est confiée à la société TDF;

-    une remise liée au volume de chiffre d’affaires réalisé par la société TDF auprès de chaque multiplex ;

-    la fourniture gratuite de la prestation de synchronisation des émetteurs lorsque la totalité des émetteurs d’une plaque mono fréquence est confiée à la société TDF par le mutiplex, assimilable à une remise.

Sur la position dominante de la société TDF :

Au regard des parts de marchés détenues par l’opérateur historique et des barrières à l’entrée sur les marchés de gros amont et aval de la diffusion hertzienne de programmes télévisuels en mode numérique, l’Autorité de la concurrence confirme que la société TDF détient une position dominante sur les marchés de gros amont et aval des services de diffusion numérique par voie hertzienne.

Sur les pratiques constitutives d’abus de position dominante :

Concernant la première pratique, l’Autorité considère qu’en mettant « en œuvre une pratique de dénigrement auprès des collectivités locales consistant à pointer un risque non avéré de perturbation technique du seul fait de l’implantation d’un pylône concurrent » et en instrumentalisant « l’existence de décrets instituant des servitudes au profit de l’ancien établissement public, servitudes parfois inexistantes, pour affirmer la nécessité d’être consultée par les maires avant d’autoriser des travaux et pour s’opposer, par des avis négatifs, aux projets d’infrastructures de diffusion des concurrents », la société TDF a abusé de sa position dominante.

Concernant la seconde pratique, l’Autorité de la concurrence considère que seule la première remise est constitutive d’abus de position dominante. La société TDF a abusé de sa position dominante en « mettant en œuvre une remise de plaque géographique qui tend à restreindre, sans justification objective, l’approvisionnement des multiplex auprès des opérateurs concurrents pour une part significative des sites de diffusion.

Sur la gravité des pratiques :

En dénigrant l'implantation d'infrastructures de diffusion concurrentes et en instrumentalisant des servitudes auprès des collectivités locales, la société TDF a empêché l'accès au marché et le développement de ses concurrents par des moyens ne reposant pas sur une compétition par les mérites.

Cette pratique est d’autant plus grave que la société TDF, détentrice d’un patrimoine unique d’infrastructures de diffusion hertzienne terrestre et d’une notoriété inégalée auprès des collectivités locales, a entretenu une confusion entre sa situation d'entreprise privée en concurrence et son ancien statut en se prévalant de servitudes accordées au temps du monopole public. La société TDF avait une responsabilité particulière de ne pas abuser de sa position dominante au moment du déploiement de la TNT dont le service de diffusion était un marché ouvert à la concurrence.

La remise fidélisante, qui était subordonnée au fait que les multiplex s’approvisionnent auprès de la société TDF pour la totalité ou une partie importante de leurs besoins en sites de diffusion sur ces plaques, est également grave dans la mesure où, mise en œuvre par un opérateur dominant, elle a eu pour effet de restreindre la concurrence.
 
Sur les sanctions prononcées

L'Autorité prononce donc une sanction de 20,6 millions d'euros à l’encontre de la société TDF (11,6 millions au titre du discours trompeur et dénigrant et 9 millions au titre des remises fidélisantes).


(Décision n° 16-D-11 du 6 juin 2016 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la diffusion de la télévision par voie hertzienne terrestre)

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