Omission des mentions obligatoires dans l’acte de cession de fonds de commerce
Rappel de la sanction qui s’impose en cas d’omission des mentions obligatoires dans l’acte de cession de fonds de commerce.
L’article L. 141-1 du Code commerce liste les mentions obligatoires que tout acte de cession amiable de fonds de commerce est tenu d’énoncer :
1° Le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acte d'acquisition et le prix de cette acquisition pour les éléments incorporels, les marchandises et le matériel ;
2° L'état des privilèges et nantissements grevant le fonds ;
3° Le chiffre d'affaires qu'il a réalisé durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente, ce nombre étant réduit à la durée de la possession du fonds si elle a été inférieure à trois ans ;
4° Les résultats d'exploitation réalisés pendant le même temps ;
5° Le bail, sa date, sa durée, le nom et l'adresse du bailleur et du cédant, s'il y a lieu.
Le texte précise que « l’omission des énonciations ci-dessus prescrites peut, sur la demande de l'acquéreur formée dans l'année, entraîner la nullité de l'acte de vente ».
Pour autant, cela signifie-t-il que toute omission d’une mention susvisée est sanctionnée automatiquement par la nullité ? A quelle condition la nullité de l’acte est-elle encourue ?
Dans l’affaire commentée, l’acquéreur a acquis début 2009 un fonds de commerce qui n'était plus exploité depuis quelques mois. L'acte de vente ne mentionnait pas le résultat d’exploitation pour la période du 1er janvier au 30 juin 2008. Il demande l'annulation de la vente sur le fondement de l'article L 141-1 du Code de commerce.
La Cour de Colmar constate que si l'acte de cession du fonds de commerce ne mentionne pas le résultat d'exploitation pour la période du 1er janvier au 30 juin 2008, l’acquéreur a néanmoins été informée par les mentions y figurant de la durée pendant laquelle le fonds a été exploité, de la baisse régulière du chiffre d'affaires entre 2006 et 2007 et entre 2007 et 2008, du très faible résultat réalisé en 2006 et 2007 et du caractère déficitaire de l'activité en 2008, même si la perte n'a pas été chiffrée.
Les juges du fonds en déduisent que l’acquéreur ne démontre pas que son consentement a été vicié par une erreur sur les qualités substantielles du bien vendu faute d'avoir pu en appréhender la commercialité comme il le prétend.
La Cour de cassation approuve, et considère que de ces appréciations souveraines, la cour d'appel a pu déduire que l'acte de cession n'encourait pas l'annulation.
Cet arrêt se situe dans la lignée de la jurisprudence constante relative à l’article L. 141-1 du Code de commerce.
En effet, la Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de préciser que la sanction de l’omission des mentions obligatoire n’est encourue que si le consentement de l’acquéreur a été vicié et s’il subit un préjudice (Cass. com. 1-12-1992 n°90-14578) :
« Mais attendu, en premier lieu, que l'omission dans l'acte de cession d'un fonds de commerce des diverses mentions rendues obligatoires par l'article 12 de la loi du 29 juin 1935 ne suffit pas à entraîner la nullité de l'acte ; qu'après avoir énoncé qu'il ne peut être reproché aux époux X... de n'avoir pas donné d'élément concernant la période durant laquelle le fonds avait été donné en location-gérance, la cour d'appel relève que l'omission des énonciations prescrites ne porte que sur les quatre derniers mois de l'année 1984 et que le compte de résultats de l'exercice 1984 a été annexé à l'acte de cession, de sorte qu'elle a pu retenir que le consentement des acquéreurs n'avait pas été vicié par l'omission invoquée.»
Dans cet arrêt, la haute Cour avait également distingué les conséquences de l’omission d’une mention obligatoire et celles de son inexactitude, cette dernière ne pouvant selon elle « donner lieu qu’à l’action en garantie (…), sans pouvoir entraîner, à la différence de leur omission, l'annulation de la vente du fonds de commerce. »
Enfin, précisons que dans l’affaire commentée, l’acquéreur demandait l'annulation de la vente pour non-respect des dispositions de l'article L 141-2 du Code de commerce imposant aux parties de viser tous les livres de comptabilité relatifs aux trois exercices comptables précédant celui de la vente.
Cette demande est également rejetée, les juges rappelant que le non-respect de cette prescription n’est, quant à lui, pas sanctionné par la nullité. Position qui confirme à nouveau la jurisprudence antérieure (Cass. com. 12-10-2010 n° 07-17.933).
Notons en l’espèce que la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 - art. 129 dite Sapin II a supprimé l’obligation de viser tous les livres de comptabilité, de sorte que la question ne se pose plus pour les acte de cession régularisés depuis son entrée en vigueur.
Cass. com. 25 janvier 2017 n° 15-19.399, F+D
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