Résiliation du bail cédé : l’acquéreur du droit au bail dispose-t-il d’un recours ?
jeudi 14 novembre 2024

Résiliation du bail cédé : l’acquéreur du droit au bail dispose-t-il d’un recours ?

En cas de cession du droit au bail, le vendeur est responsable de la régularité de la cession vis-à-vis du bailleur. Si la cession est irrégulière, l’acquéreur du droit au bail bénéficie d’une garantie d’éviction qu’il peut opposer au vendeur.  

 
Une société, locataire de locaux commerciaux, cède son droit au bail

A la demande du bailleur, la résiliation judiciaire du bail est prononcée aux torts du vendeur en raison de l'irrégularité de la cession du bail. 

L’acquéreur est condamné au paiement d'une certaine somme au titre des loyers et indemnités d'occupation ainsi qu’à la libération des locaux commerciaux. 

Un commandement de quitter les lieux est délivré à la demande du bailleur. 

L’acquéreur, après avoir quitté les locaux, assigne le vendeur sur le fondement de la garantie d'éviction en indemnisation de son préjudice. 

En défense, le vendeur sollicite le remboursement des loyers et indemnités d'occupation pour la période pendant laquelle l’acquéreur a occupé les lieux. 

Le vendeur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de remboursement. 

En premier lieu, le vendeur soutient que l'indemnité d'occupation représente la contrepartie de la jouissance des lieux et que la cour d’appel, qui a constaté que l’acquéreur avait occupé les lieux, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ; 
 
En deuxième lieu, le vendeur soutient que l'indemnité d'occupation est due par l'occupant, même en l'absence de toute faute. 

Dans sa décision, la haute juridiction rappelle les dispositions de l’article 1630 du code civil, selon lesquelles en cas d’éviction de l’acquéreur, si la garantie a été promise, ou s'il n'a rien été stipulé à ce sujet, l’acquéreur est fondé à demander au vendeur : 
1° La restitution du prix ; 
2° Celle des fruits, lorsque l’acquéreur est obligé de les rendre au propriétaire qui l'évince ; 
3° Les frais faits sur la demande en garantie de l'acquéreur, et ceux faits par le demandeur originaire ; 
4° Enfin les dommages et intérêts, ainsi que les frais et loyaux coûts du contrat. 
 

Selon la Cour de cassation, il résulte de ces dispositions que le vendeur, lorsque le bailleur dénie la qualité de locataire à l’acquéreur en raison de l'inopposabilité de la cession, ne peut pas obtenir de l’acquéreur évincé le remboursement des loyers et indemnités d'occupation qu’il a payés pour la période où l’acquéreur a occupé les lieux. 

Avant de confirmer la décision de la Cour d’appel qui a rejeté la demande de remboursement formée par le vendeur, la Haute juridiction relève : 

- D’une part, que la cour d'appel a retenu que le vendeur était seul et entièrement responsable de l'éviction de l’acquéreur et qu'il devait l'en garantir. 
- D’autre part, que la cour d’appel a constaté que l’acquéreur avait libéré les locaux. 

 

Cette décision permet de faire un point sur la garantie d'éviction dont bénéficie un acquéreur dans le cadre de la cession d'un droit au bail ou de la cession d'un fonds de commerce. 

Le principe de cette garantie est exprimé par l'article 1626 du code civil. 

Le vendeur est tenu de garantir l'acquéreur contre toute éviction même si aucune stipulation n'a été faite dans l'acte de vente. 

La Cour de cassation a confirmé cette garantie d’éviction dans plusieurs décisions. 

Ainsi, aux termes d'un arrêt rendu le 30 avril 2003, elle avait jugé que cette garantie d'éviction bénéficie à l'acquéreur même si ce dernier avait connaissance du risque d'éviction lors de la cession. 

La perte d'une partie de la surface louée constitue, selon la cour, une éviction partielle justifiant l'application de la garantie (Cass. 3ème civ, 30 avril 2003, n°02-10032). 

La Cour de cassation a également jugé que la cession d'un droit au bail qui, au lieu de conférer au cessionnaire les droits attachés à un bail commercial ne lui donne que le bénéfice d'un sous-bail, sans droit au renouvellement, ouvre droit à la garantie d'éviction du cédant ( Cass. 3e civ., 10 oct. 2019, n° 18-16.063) 

Quant au préjudice, elle estime que l'acquisition d'un fonds de commerce comportant un droit au bail qui ne confère pas le droit au renouvellement cause un préjudice matériel actuel et certain au cessionnaire. 

Il résulte de ce qui précède que les preneurs doivent faire appel à un professionnel du droit pour rédiger ou auditer les baux ainsi que les actes de cession de fonds de commerce ou de droit au bail, ceci pour prévenir toute difficulté ou litige quant à la mise en jeu de la garantie d’éviction

 

C. Cass 3è civ., 4 juillet 2024, Arrêt n° 397 FS-B, Pourvoi n° Z 23-13.822

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