Résiliation anticipée du bail commercial et créanciers inscrits
À tout moment, le preneur et le bailleur peuvent d’un commun accord mettre fin au bail commercial, en cours de bail ou en tacite prolongation. Le bail est alors résilié par amiablement.
Il ne s’agit pas d’une résiliation judiciaire résultant de l’acquisition de la clause résolutoire ou d’une demande de résiliation pour faute du bail. Il ne s’agit pas davantage de mettre fin au bail par un congé à une échéance triennale ou en tacite prolongation.
Le gage des créanciers inscrits sur le fonds de commerce étant impacté par la résiliation, avant le terme du bail, le législateur a prévu que la résiliation ne devienne définitive qu’ « un mois après la notification » qui lui est faite de la résiliation amiable.
Le fonds de commerce est une universalité dont les différentes composantes sont les suivantes (articles L. 141-1 et L. 141-2 du code de commerce) :
- des éléments corporels (matériel, marchandises, agencements),
- et des éléments incorporels (clientèle, achalandage, nom commerciale, enseigne, droit au bail, brevets, marques, licences).
Il constitue un bien meuble incorporel sur lequel les créanciers peuvent prendre des suretés, appelées nantissements.
Ce type de sûreté permet au commerçant, débiteur par exemple d’une obligation de remboursement d’un crédit, d’offrir à un créancier une garantie sans être dépossédé de son outil de travail.
Ainsi, lorsque le commerçant convient avec son bailleur de résilier de manière anticipée son bail commercial qui constitue un élément fondamental de la valeur du fonds de commerce, le gage du créancier est mis en péril.
1. Le principe de la notification aux créanciers inscrits
A cet égard, l’article L.143-2 du Code de commerce dispose que :
« Le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile déclaré par eux dans leurs inscriptions. Le jugement ne peut intervenir qu'après un mois écoulé depuis la notification.
La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles déclarés par eux dans leurs inscriptions. »
Le premier alinéa est consacré aux hypothèses de résiliation judiciaires du bail commercial.
Le second alinéa concerne spécifiquement les résiliations amiables. La résiliation du bail commercial ne peut intervenir qu’un mois après la notification qui en est faite aux créanciers inscrits.
L’objet de l’obligation, issue de l’article L.143-2 du Code de commerce, est d’informer les créanciers d’un risque sur leur gage.
Le défaut de respect de cette formalité rend inopposable la résiliation, judiciaire ou amiable au créancier inscrit. Par ailleurs, le créancier inscrit est susceptible de solliciter l’octroi de dommages et intérêts pour réparer son préjudice.
2. En pratique : conséquences de la résiliation amiable du bail commercial pour les créanciers
Dans ces conditions, lorsque le bailleur et le preneur se mettent d’accord sur le principe d’une résiliation amiable du bail, il importe de lever un état des nantissements et privilèges inscrits sur le fonds de commerce.
Si des créanciers sont identifiés, trois possibilités se présentent :
A. Notification de l’acte de cession :
Les parties peuvent se contenter de notifier l’acte de résiliation amiable au créancier inscrit.
Dans cette hypothèse, en application de l’article L143-2 alinéa 2 du Code de commerce : « La résiliation amiable du bail commercial ne devient définitive qu'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles déclarés par eux dans leurs inscriptions. »
B. Recherche d’une solution en se rapprochant du créancier inscrit pour obtenir la levée de l’inscription avant la prise d’effet de la résiliation.
Les parties peuvent convenir dans l’acte de résiliation amiable sous condition suspensive que la résiliation ne prendra effet qu’en cas de levée de l’inscription dans un délai déterminé.
Le preneur doit alors se rapprocher de son créancier, tel une banque, pour lui démontrer que sa créance a été totalement « remboursée », ou lui proposer un remboursement de l’intégralité de sa dette de manière anticipée ou lui proposer une nouvelle garantie en substitution.
La résiliation anticipée et la possibilité pour le preneur de quitter les lieux ne pourra intervenir qu’en cas de réalisation de cette condition suspensive de mainlevée du nantissement.
C. Engagement du preneur de garantir le bailleur contre tous recours créancier
Cette hypothèse est bien évidemment la plus risquée et ne doit pas être privilégiée.
Le preneur déclare dans l’acte de résiliation amiable faire son affaire personnelle de toute revendication du créancier inscrit et garantir le bailleur de tous recours.
Des précautions doivent nécessairement être prises en amont par le preneur. Il peut, par exemple, se rapprocher du créancier inscrit et lui proposer une nouvelle sûreté.
La mise en place d’une nouvelle garantie peut générer un formalisme lourd, incompatible avec le calendrier choisi par les parties.
Le preneur devra veiller à minima à obtenir un accord de principe du créancier.
La bonne solution doit être appréciée au cas par cas et nécessite l’accompagnement d’un conseil.
En sus de cette problématique liée à la protection des créanciers inscrits, le preneur et le bailleur doivent se mettre d’accord sur le solde de tout compte, les éventuelles indemnités et organiser les modalités de restitution des locaux.
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