DEPOT DE MARQUE FRAUDULEUX
La fraude qui peut affecter le dépôt d’une marque a été, faute de définition légale, définie par la jurisprudence et la doctrine (1). La victime d’un dépôt frauduleux dispose de divers recours pour revendiquer ses droits (2).
1. Absence de définition légale de la fraude en droit des marques
La fraude des marques n’est définie ni en droit français ni en droit communautaire.
Le droit français n’envisage cette notion que dans le cadre de l’action en revendication définie à l’article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle, se contentant de la distinguer de la violation d’une obligation légale ou conventionnelle.
Le Règlement CE n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire et la Directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, n’apportent pas plus d’éléments de définition de cette notion et se contentent de faire référence à la « mauvaise foi » du déposant.
La jurisprudence et la doctrine française se sont donc attachées à définir cette notion.
La Cour d’appel de Paris a pu définir le fraude comme le fait de « déposer - une marque - dans la seule intention de nuire et/ou de s’approprier indûment le bénéfice d’une opération légitimement entreprise ou d’y faire obstacle en lui opposant la propriété de la marque frauduleusement obtenue » (CA Paris, 23 février 2000).
La Cour de cassation a indiqué qu’ « un dépôt de marque est entaché de fraude lorsqu’il est effectué dans l’intention de priver autrui d’un signe nécessaire à son activité » (Cass.com., 25 avril 2006, pourvoi n° 04-15641).
Finalement, la fraude qui peut affecter un dépôt de marque se caractérise par deux éléments :
- la connaissance par le déposant des droits ou de l’usage antérieur auquel il porte atteinte ;
- l’intention de nuire du déposant.
La preuve de la fraude devra être rapportée par celui qui l’invoque. Il devra en particulier démontrer la connaissance qu’avait le fraudeur des droits antérieurs au mépris desquels il a effectué le dépôt de marque. L'intention de nuire se déduit de cette connaissance.
2. Les recours possibles de la victime du dépôt frauduleux
2.1. En droit français, la victime de la fraude dispose de deux recours possibles : l’action en revendication, fondée sur l’article L.712-6 du Code de la propriété intellectuelle, et l’action en nullité de la marque, fondée sur la théorie générale de la fraude.
L’action en revendication permettra à la victime de se voir reconnaître la propriété de la marque en bénéficiant de la date du dépôt opéré par le déposant fraudeur. L’article L.712-6 du Code de propriété intellectuelle dispose en effet « Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, […], la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice. »
Si la victime de la fraude ne souhaite pas devenir propriétaire de la marque déposée frauduleusement - ce qui peut être le cas lorsque le dépôt est effectué sous une forme qui ne lui convient pas - elle a la possibilité d’agir en nullité de la marque.
2.2. Pour les marques communautaires, la victime de la fraude ne pourra pas revendiquer la propriété de la marque.
Elle peut uniquement agir en nullité de la marque contre le déposant de « mauvaise foi ». Le dépôt frauduleux pourra également constituer un motif d’opposition à une demande d’enregistrement lorsque celle-ci a été effectué par l’agent ou le titulaire de la marque sans l’accord de son mandant.