Licéité de la suspension d’un référencement pour des raisons légales de conformité
La Cour de cassation valide la pratique de Google de suspendre les comptes publicitaires de ses clients en cas de manquements suspecté ou avéré par ces derniers à la législation.
Le 4 septembre 2024, la Cour de cassation s’est prononcée sur la licéité de la suspension des comptes publicitaires par les plateformes en ligne en cas de manquements suspecté ou avéré à la législation.
Dans cette affaire, une société luxembourgeoise Fathi Enterprise, titulaire des droits sur la plateforme « cartegrisefrance.fr », dédiée aux démarches destinées à l'obtention de certificats d'immatriculation de véhicules automobiles auprès des services de l’Etat français, a conclu avec la société irlandaise Google Ireland un contrat pour le référencement payant de son site au moyen du service « Google Adwords » (devenu aujourd’hui « Google Ads »).
Les conditions générales du contrat incluaient une clause (article 13) permettant à Google de modifier les conditions ou de suspendre le service en cas de manquement aux politiques ou pour des raisons légales.
En novembre 2017, après avoir reçu un courriel du secrétariat d'État chargé du numérique l’informant du caractère trompeur du site auquel elle donnait accès, Google Ireland a suspendu le compte de la société Fathi. Contestant cette suspension et le refus de réactiver son compte, la société Fathi, aux droits de laquelle vient la société Up to Motion, a assigné Google Ireland et Google France en justice, demandant notamment l'annulation de l'article 13 des conditions générales du contrat sur le fondement du déséquilibre significatif.
A ce titre, elle soutenait notamment que son activité de mandataire pour les démarches d'immatriculation était légale et ne nécessitait pas d'habilitation spécifique, contrairement à ce que prétendait Google et que Google n'avait pas de preuve suffisante de manquement aux règles ou de caractère illicite de son activité pour justifier la suspension.
Déboutée en appel, la société Up to Motion forme un pourvoi en cassation.
La question de droit posée à la Cour de cassation était de savoir si la clause contractuelle permettant à Google de suspendre unilatéralement le compte publicitaire de la société Fathi était valide, ou si elle créait un déséquilibre significatif entre les parties, en violation de l'article L. 442-6 du Code de commerce (devenu l'article L. 442-1).
La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme la décision de la cour d’appel en ce qu’elle considère que la clause permettant à l’hébergeur de suspendre sans préavis un contrat de référencement pour des raisons légales ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
Au contraire, la cour a souligné que cette clause était conforme à l'obligation légale des hébergeurs d'agir promptement pour retirer des données illicites ou en rendre l'accès impossible.
Pour rappel, il résulte de l’article 6, paragraphe 2, de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016, que pèse sur les hébergeurs l’obligation légale d’agir promptement pour retirer des données dont ils connaissent le caractère illicite ou pour en rendre l’accès impossible et qu’ils engagent leur responsabilité en cas de manquement à cette obligation.
En l’occurrence, la suspension du compte de la société Fathi par Google a été jugée légitime par la Cour relevant que la société Fathi ne disposait pas de l'habilitation requise pour collecter les données nécessaires à l'établissement de certificats d'immatriculation et pour prélever les taxes prévues par le code général des impôts. En conséquence, l'activité de la société Fathi était illicite et justifiait la suspension du compte par Google.
L’article 6 de la LCEN commel’article 6 du Digital Services Act (« DSA ») aujourd’hui se révèlent être un précieux fondement dont les plateformes en ligne ne manqueront pas de se prévaloir pour justifier la clause de leurs conditions générales leur reconnaissant la possibilité de suspendre immédiatement le compte de l’exploitant d’un site « pour des raisons légales », notamment lorsqu’il apparaît que l’activité exercée via le site présente un caractère illicite, sans succomber à la sanction du déséquilibre significatif.
(Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique, 4 septembre 2024 – n° 22-12.321)
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