Brexit : quels impacts pour les enseignes ?
Quelles peuvent être les conséquences du Brexit pour les enseignes opérant au Royaume-Uni ou souhaitant s’y développer ?
Les conséquences du Brexit ne seront précisément connues qu’à l’issue du processus de négociation qui s’ouvrira une fois la notification de retrait adressée par le Royaume-Uni. Le Royaume-Uni restera-t-il dans l’Espace Economique Européen ou non, quel sera le contenu exact des traités ou accords conclus avec l’Union Européenne ? Une chose est sûre, en application de l’article 50 du Traité sur l’Union Européenne, et à moins qu’un accord complet sur la sortie du Royaume-Uni ne soit trouvé avant, ce qui semble improbable, les traités européens cesseront de s’appliquer deux ans après la notification de retrait adressée au Conseil Européen par le Royaume-Uni. Cette notification pourrait intervenir d’ici la fin du mois de mars.
Deux domaines sont notamment au cœur des questions qui intéressent les enseignes opérant ou souhaitant opérer au Royaume-Uni : le droit des marques et le droit de la concurrence. Compte tenu des incertitudes entourant la sortie du Royaume-Uni, ainsi que des annonces faites jusqu’à présent, nous prendrons comme hypothèse que le Royaume-Uni ne sera pas membre de l’Espace Economique Européen.
En matière de droit des marques, dès lors que la sortie du Royaume-Uni sera effective, les marques de l’Union Européenne cesseront de s’appliquer pour le Royaume-Uni. Il conviendra donc, pour les dépôts réalisés après la sortie du Royaume-Uni, de réaliser des dépôts spécifiquement auprès de l’office de propriété industrielle du Royaume-Uni. La question de la protection au Royaume-Uni des marques de l’Union Européenne enregistrées avant la sortie du Royaume-Uni n’est par contre pas résolue à ce jour. Parmi les solutions envisageables :
- Le Royaume-Uni continuerait à reconnaître la protection offerte par les marques de l’Union Européenne antérieures ;
- Au contraire le Royaume-Uni imposerait de procéder à un nouvel enregistrement local ;
- Un mécanisme de conversion serait mise en place, permettant aux titulaires de marques de l’Union Européenne de bénéficier d’un enregistrement national en lieu et place de la marque communautaire.
Quelle sera alors la date d’enregistrement prise en compte (et donc l’antériorité reconnue) : celle du dépôt communautaire originel ou celle de la conversion ? Un nouvel examen de la demande sera-t-il réalisé ? Une nouvelle période d’opposition sera-t-elle ouverte ? Une exploitation au Royaume-Uni, effective et antérieure à la demande de conversion sera-t-elle requise ?
Des questions similaires vont se poser pour les dessins et modèles communautaires.
Il conviendra d’être vigilant sur les négociations à venir en matière de propriété intellectuelle pour anticiper les formalités à accomplir le cas échéant. Pour les enseignes pour lesquelles le marché britannique est un marché essentiel et qui devront organiser la protection de leur marque au Royaume-Uni, il conviendra d’étudier l’intérêt de procéder dès maintenant à un dépôt national auprès de l’office britannique de propriété intellectuelle, en plus d’un dépôt auprès de l’EUIPO si elles souhaitent une protection communautaire par ailleurs.
En matière de droit de la concurrence, les conséquences du Brexit sont de plusieurs ordres. Nous n’aborderons pas ici la question des aides d’Etats, qui concernent en principe assez peu les enseignes de distribution.
En matière de pratiques anti-concurrentielles (ententes, abus de position dominante), un brutal changement des règles applicables n’est pas à anticiper dans la mesure où le Competition Act britannique de 1998 contient des dispositions très similaires à celles des textes européens. Il est par contre à anticiper que l’application de ces principes évolue au fil du temps après la sortie du Royaume-Uni. Tout d’abord lesrèglements d’exemption européens, d’application directe, cesseront de s’appliquer dès la sortie. Le Royaume-Uni pourrait alors adopter des règlements d’exemption comportant des dispositions différentes, validant ou au contraire empêchant des pratiques ou clauses différentes de celles des règlements européens. Surtout, à compter de la sortie du Royaume-Uni, les tribunaux et cours britanniques ne seront plus tenus par les interprétations de la Cour de Justice de l’Union Européenne. Ils pourront alors développer une interprétation plus spécifique des textes en vigueur.
Cela ne veut pas dire par contre que des accords impliquant le Royaume-Uni ne seront plus appréhendés par le droit européen et les règles européennes. En effet, dès lors que le commerce entre Etats membre sera affecté, le droit européen continuera à s’appliquer. Les accords ou pratiques concernant le Royaume-Uni pourront donc être appréhendés tant par les autorités britanniques, au regard de leurs règles nationales, que par les autorités européennes. Les autorités de concurrence tant européennes que britanniques, pourront par ailleurs être amenées à engager des procédures en parallèle, relatives aux mêmes accords ou pratiques. Les accords à venir devront donc concilier les deux systèmes. Il sera dès lors d’autant plus nécessaire de faire valider les accords concernant le Royaume-Uni par des confrères compétents en droit anglais, afin d’éviter tous risques liés à une interprétation spécifique des autorités locales.
A noter dans ce cadre que les règles européennes protègent spécifiquement les échanges entre une entreprise et ses avocats, dès lors que ceux-ci sont inscrits dans un Etat membre. Ces échanges étant confidentiels, les autorités de la concurrence européenne ne peuvent par exemple pas les saisir à l’occasion de leurs investigations. Dès lors que le Royaume-Uni ne sera plus dans l’Union Européenne, les échanges avec des avocats inscrits au Royaume-Uni et pas dans un pays de l’Union Européenne ne bénéficieront plus de cette protection.
En matière de contrôle des concentrations, les conséquences du Brexit seront un risque de procédures parallèles dès lors que l’opération envisagée atteindra à la fois les seuils britanniques et les seuils européens, augmentant le coût et présentant un risque de décisions contradictoires. En effet, le principe du « guichet unique » selon lequel seules les autorités communautaires sont compétentes pour se prononcer sur une opération dépassant les seuils européens ne sera plus applicable.
Si aucune mesure n’est immédiatement nécessaire, il conviendra d’être vigilant quant aux discussions à intervenir entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne. Cette vigilance sera particulièrement nécessaire en matière de marques, afin de ne pas perdre le bénéfice de protections existantes et, pour les dépôts à venir, de sécuriser au mieux les dépôts à venir. En matière de droit de la concurrence, les conséquences se manifesteront à plus long terme mais le Brexit impliquera une attention particulière de l’évolution de la pratique des autorités et tribunaux britanniques dans les années à venir, ainsi qu’un risque plus élevé de procédures parallèles le cas échéant.
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