Autonomie de l’action du Ministre de l’économie fondée sur l’article L. 442-6 du Code de commerce
L’action du Ministre de l’économie fondée sur l’article L. 442-6 du Code de commerce est une action autonome dont la connaissance est réservée aux juridictions étatiques, rendant une clause d’arbitrage inapplicable au litige.
Le Ministre de l’économie assigne la société Appel Distribution International et la société Apple France sur le fondement de l’article L. 442-6, III, du Code de commerce aux fins de voir prononcer la nullité de certaines clauses du contrat de distribution conclu entre la société Appel distribution international et la société Orange.
Les défenderesses soulèvent l’incompétence de la juridiction étatique en raison de l’existence d’une clause compromissoire stipulée dans le contrat de distribution.
La question qui se posait dans ce litige était de savoir si la juridiction étatique, saisie par le Ministre de l’économie, sur le fondement de l’article L. 442-6 du code de commerce, d’un litige relatif à un contrat comportant une clause compromissoire, devait se déclarer incompétente afin que le tribunal arbitral statue sur sa propre compétence en application du principe de compétence-compétence prévu par l’article 1448 du Code de procédure civile qui prévoit que « lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable ».
La Cour d’appel rejette le contredit et donc l’exception d’incompétence soulevée par les défenderesses aux motifs que :
- la clause compromissoire contenue dans le contrat de distribution ne s’applique qu’aux parties, le Ministre de l’économie est tiers au contrat et le principe de compétence-compétence ne peut s’appliquer qu’à des engagements souscrits entre des parties à un ou plusieurs contrats ;
- l’action engagé par le Ministre est au regard de sa nature et de son objet « de celles dont la connaissance est réservée aux juridictions étatiques » ;
- la clause d’arbitrage est manifestement inapplicable en raison du caractère autonome de l’action du Ministre ;
- l’action du Ministre repose par principe sur des considérations d’ordre public visant à la protection du fonctionnement du marché et de la concurrence.
Devant la Cour de cassation, les sociétés Apple reprochent à la Cour d’appel d’avoir violé les articles 1448 et 1506 du Code de procédure civile, le principe de compétence-compétence et les principes de droit international privé aux motifs que :
- le juge saisi d’un litige relatif à un contrat comportant une clause d’arbitrage doit se déclarer incompétent afin que l’arbitre statue par priorité sur sa compétence, sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la clause ;
- l’inapplicabilité manifeste d’une clause d’arbitrage à un litige ne peut se déduire de la seule qualité de tiers au contrat du demandeur à l’action ;
- la cour d’appel a statué par un motif impropre à caractériser le caractère manifestement inapplicable de la clause d’arbitrage au litige ;
- les articles L. 442-6, III, et D. 442-3 du Code de commerce ne consacrent pas un privilège de juridiction à raison de la nationalité des personnes visées à l’article L. 442-6, III, alinéa 1er, pour saisir les juridictions étatiques françaises, à l’exclusion de toute autre juridiction ;
- le seul fait que l’action du Ministre soit potentiellement fondée sur des considérations d’ordre public n’est pas de nature à rendre la clause d’arbitrage manifestement inapplicable ;
- les demandes présentées visaient la remise en cause de l’économie d’un contrat international conclu entre personnes privées, ce qui est de nature à exclure toute inapplicabilité « manifeste » de la clause d’arbitrage stipulée dans le contrat ;
- un doute ou une incertitude pouvait exister quant à l’applicabilité de la clause d’arbitrage, dès lors que des prétentions formulées par le demandeur visaient directement le contrat international comportant cette clause et compte-tenu des liens réels ou apparents pouvant exister entre les parties en cause.
Le pourvoi des défenderesses est rejeté.
La Cour de cassation considère en effet que c’est à bon droit que l’arrêt a :
- jugé « après avoir rappelé que l’article L. 442-6, III, du code de commerce réserve au ministre chargé de l’économie la faculté de saisir le juge pour faire cesser des pratiques illicites et prononcer des amendes civiles, que l’action ainsi attribuée au titre d’une mission de gardien de l’ordre public économique pour protéger le fonctionnement du marché et de la concurrence est une action autonome dont la connaissance est réservée aux juridictions étatiques au regard de sa nature et de son objet »
- caractérisé « l’inapplicabilité manifeste au litige de la convention d’arbitrage du contrat de distribution, le ministre n’agissant ni comme partie au contrat ni sur le fondement de celui-ci ».
Cass.com. 6 juillet 2016, RG n° 15-21.811
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