La CJUE clarifie un débat de longue date : les clauses de parité ne constituent pas des restrictions accessoires
samedi 25 janvier 2025

La CJUE clarifie un débat de longue date : les clauses de parité ne constituent pas des restrictions accessoires

A l’occasion d’une nouvelle affaire Booking.com et des questions préjudicielles posées par la juridiction de renvoi allemande, la Cour de Justice retient queles clauses de parité ne sont pas des restrictions accessoires mais doivent être analysées sous l’angle des restrictions verticales

La décision Booking.com de la Cour de Justice de l’Union Européenne du 19 septembre, rendue à l’occasion de deux questions préjudicielles, apporte des clarifications sur l’application de l’article 101 §1 TFUE (ententes) aux clauses de parité et sur la théorie des restrictions accessoires. La question de la légalité de ces clauses est débattue depuis plus de 10 ans. La décision de la Cour de Justice commentée est inédite en ce qu’elle retient une décision claire très attendue. 

Pour mémoire, jusqu’en 2015, les conditions générales de Booking.com applicables à ses accords avec les prestataires d’hébergement comportaient une clause de « parité étendue », interdisant à ces derniers d’offrir des chambres à un prix inférieur à celui proposé sur booking.com. Elle a été remplacée par une clause de parité restreinte en concertation avec les autorités de concurrence française, italienne et suédoise. Mais, aux termes d’une décision de 2015, l’autorité de la concurrence allemande a jugé que la clause de parité restreinte était contraire à la prohibition des ententes ordonnant la cessation de son utilisation. C’est dans le cadre du recours contre la décision de l’autorité que la juridiction de renvoi a saisi la Cour de Justice de ses questions préjudicielles. 

A titre préalable, on rappellera que la clause de parité tarifaire ou « clause du client le plus favorisé » est celle qui consiste à imposer à un hôtelier de garantir à la plateforme – ici booking.com – des prix plus compétitifs que ceux qui sont proposés aux concurrents. On distingue la clause de parité restreinte, qui interdit à l’hôtelier de pratiquer des prix plus compétitifs en direct, de la clause de parité étendue, qui interdit à l’hôtelier de pratiquer des prix plus compétitifs que ce soit sur leurs propres canaux de vente ou sur d’autres plateformes concurrentes.  

Quant aux restrictions accessoires, elles couvrent (i) toute les restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation d’une opération principale non restrictive de concurrence et (ii) qui serait proportionnée. La théorie des restrictions accessoires confère alors à certaines restrictions anticoncurrentielles un caractère licite lorsque celles-ci sont directement liées et nécessaires à une pratique licite : l’accessoire suit le principal. 

Ici, la question est de savoir si la clause de parité constitue une restriction accessoire à l’opération principale de Booking.com qui est la fourniture de services de réservation hôtelière en ligne.  

La Cour y répond par la négative.  

Elle juge que les clauses de parité étendue, comme de parité restreinte, ne peuvent être objectivement nécessaires pour assurer la viabilité économique de la plateforme de réservation hôtelière. En effet, quand bien même ces clauses permettraient de lutter contre d’éventuels phénomènes de parasitisme et de garantir des gains d’efficacité, elles ne sont pas pour autant indispensables à la réalisation de l’opération principale. Ceci est d’ailleurs par l’analyse contrefactuelle qui permet de conclure que l’activité de Booking.com n’est pas compromise dans les Etats où ces clauses ont été interdites.  

La Cour insiste sur le fait que l’analyse de la qualification de restriction accessoire requiert de vérifier son caractère objectivement nécessaire et proportionné, mais n’implique pas de mettre en balance les effets pro-concurrentiels ou anticoncurrentiels d’un accord – analyse à laquelle on se livre lorsqu’il s’agit d’accorder une exemption à une restriction anticoncurrentielle. 

Aussi, après avoir clairement conclu que la clause de parité n’était pas une restriction accessoire, il fallait l’appréhender comme constituant une restriction verticale, susceptible de bénéficier d’une exemption. L’examen de sa licéité devra passer par la définition du marché pertinent.  

Cet exercice incombe à la juridiction de renvoi.  

Répondant à la seconde question préjudicielle, la Cour de Justice apporte des indications sur la définition du marché qui présente la particularité d’être un marché multiface. Visant la communication révisée de 2024 sur la délimitation du marché pertinent – déjà commenté par le Cabinet Gouache – elle invite la juridiction de renvoi à vérifier s’il existe concrètement une substituabilité entre les services d’intermédiation en ligne et les autres canaux de vente, indépendamment du fait que ces canaux présentent des caractéristiques différentes et n’offrent pas les mêmes fonctionnalités de recherche et de comparaison des offres de services hôteliers » (pts 85 et 86). En d’autres termes, le marché en cause est-il plus large que celui des portails de réservation hôtelière ? Cette analyse devra être menée tant du point de vue des prestataires d’hébergement que des clients finals. 

Cette décision permet de clore un débat jurisprudentiel qui dure depuis des années. Elle fait suite au règlement 2022/720 qui règle la question des clauses de parité lequel prévoit que les clauses de parité étendue sont des restrictions exclues et que les clauses de parité restreinte peuvent bénéficier de l’exemption.  

Enfin, on relèvera que Booking.com a annoncé supprimer ses clauses de parité, même de parité restreinte, décision prise sous l’impulsion du DMA.

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