Imputabilité de la rupture du contrat d’agent commercial
L’assignation par l’agent commercial du mandant en résiliation du contrat n’emporte pas à elle-seule la rupture du contrat, de sorte que la rupture n’est pas imputable à l’agent de ce seul fait.
3 agents commerciaux, se prévalant des manquements du mandant, ont assigné ce dernier en résiliation du contrat d’agence à ses torts et en paiement de l’indemnité de fin de contrat.
Pour rappel, conformément à l’article L.134-13 du Code de commerce, l’indemnité de fin de contrat n’est pas due à l’agent commercial lorsque la cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent, à moins qu’elle ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant.
Pendant la procédure introduite par les agents commerciaux, le mandant a adressé une lettre à ses clients pour les informer du fait que les agents commerciaux ne le représenteraient plus.
Condamné par la Cour d’appel au paiement de l’indemnité de fin de contrat, le mandant reprochait à la Cour d’appel d’avoir considéré que la rupture était intervenue à son initiative du fait de la lettre adressée à ses clients.
Il faisait valoir devant la Cour de cassation que l’assignation des agents commerciaux manifestait leur volonté de cesser l’exécution du contrat, auquel ils avaient effectivement mis fin, de sorte que la rupture était imputable aux agents commerciaux.
Bien qu’il n’y soit pas faire référence dans l’arrêt de cassation, on comprend à la lecture de l’arrêt d’appel que les agents commerciaux avaient cessé d’exécuter leur mandat à la suite du courrier adressé par le mandant.
Sans surprise, la Cour de cassation a jugé que la demande en justice des agents commerciaux tendant à obtenir la résiliation des contrats n’emportait pas à elle seule la rupture de ces contrats. Elle confirmait donc sur ce point l’arrêt de la Cour d’appel.
Cette décision démontre que le mandant, à qui aucun manquement ne serait imputable, et qui serait confronté à un agent ayant cessé d’exécuter son contrat après l’avoir assigné en résiliation doit poursuivre l’exécution du contrat, mettre en demeure l’agent de poursuivre l’exécution, et mettre fin au contrat aux torts de l’agent pour faute grave seulement s’il n’a pas déféré à cette mise en demeure.
Le mandant faisait par ailleurs valoir que cette rupture était intervenue du fait d’une faute grave des agents commerciaux, tenant à la représentation par les agents de produits d’une société concurrente. Il entendait ainsi échapper au paiement de l’indemnité de fin de contrat, qui n’est pas due en cas de faute grave de l’agent.
Conformément à une jurisprudence constante, la faute grave est écartée dans ces circonstances lorsque le mandant avait connaissance et a toléré la représentation par ses agents commerciaux de produits concurrents.
Sur ce fondement, la Cour d’appel a écarté la faute grave des agents commerciaux au motif que le mandant avait noué un partenariat avec cette autre société que les agents représentaient, plusieurs années avant la rupture des contrats. Ce partenariat avait pour objet de faire installer par cette société les produits qui étaient vendus par le mandant.
La Cour d’appel avait notamment retenu que le mandant avait « plus que toléré, mais bel et bien accepté clairement que ces agents commerciaux interviennent également pour le compte de [son partenaire] ».
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel sur ce point au motif qu’il lui appartenait de vérifier, comme elle y était invitée, si l’autre société n’avait pas exercé, postérieurement à 2005, une activité concurrente de celle du mandant, ce qui aurait imposé aux agents commerciaux d’obtenir préalablement l’accord du mandant pour pouvoir représenter ses produits.
(Cass.Com., 6 septembre 2016, n°14-22287).
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