Projet de loi sur l’agriculture et l’alimentation
Le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable a été présenté le 31 janvier 2018 en Conseil des Ministres. Le point sur les principales mesures en matière de droit économique.
Le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable (ci-après le « Projet de loi ») a été présenté le 31 janvier 2018 en Conseil des Ministres.
Ce texte fait suite aux orientations qui se sont dégagées des Etats Généraux de l’Alimentation qui se sont déroulés de juillet à décembre 2017. Les objectifs attendus de cette vaste consultation réunissant tous les acteurs de la filière agroalimentaire, étaient d’une part, de permettre de rééquilibrer les relations entre fournisseurs et distributeurs des filières agricoles et agroalimentaires, et d’autre part, d’accompagner la transformation des modèles agricoles afin de promouvoir une alimentation saine et durable accessible à tous.
Le titre I du Projet de loi intitulé « dispositions tendant à l’amélioration de l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire », qui retiendra notre attention, a précisément pour objet de répondre à ce premier objectif de rééquilibrer les relations fournisseurs-distributeurs, par une série de mesures visant à une meilleure répartition de la valeur des produits agricoles et alimentaires ainsi que par un renforcement du pouvoir de négociation des producteurs.
Ces principales mesures en matière de droit économique sont les suivantes.
- Le relèvement du seuil de revente à perte.
Il s’agit d’une des mesures phares du Projet de loi : le seuil de revente à perte prévu à l’article L. 442-2 du Code de commerce serait relevé de 10 % pour les denrées alimentaires revendues en l’état au consommateur.
Pour mémoire, l’article L. 442-2 du Code de commerce prohibe, sous peine d’amende, le fait, pour tout commerçant, de revendre ou d'annoncer la revente d'un produit en l'état à un prix inférieur à son prix d'achat effectif.
Le prix d'achat effectif est défini depuis la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, comme « le prix unitaire net figurant sur la facture d'achat, minoré du montant de l'ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport ».
C’est ce prix d’achat effectif qui serait affecté d’un coefficient de 1,1 pour les denrées alimentaires revendues en l’état au consommateur, le but étant d’opérer une remontée de valeur sur la vente de ces produits, vers tous les acteurs de la filière jusqu’aux agriculteurs. Ainsi, les denrées alimentaires devront être vendues au moins 10 % au-dessus de leur prix d'achat effectif.
A noter que si cette disposition a vocation à s’appliquer à l’ensemble des denrées alimentaires, cette notion n’a cependant pas été définie dans le projet de loi.
Ce dispositif, qui aura probablement un effet néfaste sur les prix des produits agricoles et alimentaires pour les consommateurs, devra faire ses preuves pendant une période expérimentale d’une durée de deux ans.
- L’encadrement des promotions sur les produits alimentaires.
L’objectif de cette mesure vise à limiter la « guerre des prix » en permettant au Gouvernement, par voie d’ordonnance, d’encadrer en valeur et en volumes des ventes promotionnelles pratiquées sur les denrées alimentaires.
Des taux de promotion de 33 % en volumes et 25 % en valeur ont été évoqués lors des Etats Généraux de l’Alimentation. Ces taux devront être confirmés et la base de leur calcul précisé pour la mise en œuvre de cette mesure.
A l’instar du relèvement du seuil de revente à perte, de dispositif sera testé pendant une durée de deux ans.
- Le renversement de la logique de construction des prix pour une prise en compte des coûts de production – Rôle des inter professions
Le Projet de loi procède à la réécriture de l’article L. 631-24 du Code rural et de la pêche maritime relatif aux contrats de vente de produits agricoles et le scinde en quatre articles.
La principale nouveauté de cet article réside dans le principe selon lequel, dans les cas où la conclusion d’un contrat écrit est obligatoire, la proposition de contrat de vente des produits agricoles doit désormais émaner du producteur. Lorsque le producteur donne mandat à une organisation de producteurs ou à une association d’organisations de producteurs pour négocier la commercialisation de ses produits, le contrat conclu doit respecter les stipulations de l’accord-cadre conclu entre l’acheteur et cette organisation ou association, étant précisé que l’accord-cadre est proposé par cette organisation de producteurs ou association d’organisation de producteurs.
Le but de cette disposition est ainsi d’inverser la construction du prix en partant des coûts de production.
Il est en outre précisé la liste des clauses devant être contenues dans la proposition de contrat ou d’accord-cadre écrit et au titre desquelles devra notamment figurer la clause relative au prix ou aux critères de détermination et de révision du prix, lesquels prennent en compte « un ou plusieurs indicateurs relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture ou à l’évolution de ces coûts, un ou plusieurs indicateurs relatifs aux prix des produits agricoles et alimentaires constatés sur le ou les marchés sur lesquels opère l’acheteur, ainsi que, le cas échéant, un ou plusieurs indicateurs relatifs aux quantités, à la composition, à la qualité, à la traçabilité, ou au respect d’un cahier des charges », étant précisé que les parties auront la faculté d’utiliser tous indicateurs disponibles ou spécialement construits par elles.
A cet égard, le rôle des organisations interprofessionnelles agricoles est renforcé, le Projet de loi prévoyant qu’elles ont la possibilité de définir les indicateurs visés ci-dessus auxquels pourront se référer les contrats de vente de produits agricoles ainsi que de formuler des recommandations sur la manière de les prendre en compte pour la détermination, la révision et la renégociation des prix.
Enfin, il convient de relever que le nouvel article L. 631-25 du Code rural et de la pêche maritime prévoit de nouvelles sanctions en cas de non-respect des dispositions relatives aux contrats de vente des produits agricoles et ce, tant contre l’acheteur que contre le producteur, par exemple, en cas de contrat ne comportant pas toutes les clauses exigées ou en cas de conclusion d’un contrat de vente non conforme à l’accord-cadre.
- Le renforcement des clauses de renégociation
Le champ d’application de la clause de renégociation est modifié par le Projet de loi à plusieurs égards.
D’abord, il n’est plus fait référence à la liste des produits figurant à l’article L. 442-9 alinéa 2ème du Code de commerce, mais aux « produits agricoles et alimentaires » dont la liste sera définie par décret.
Ensuite, la clause de renégociation ne répondra plus aux fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires, mais à celle des « produits agricoles et alimentaires ou des coûts de l’énergie ».
Le Projet de loi prévoit par ailleurs que la clause de renégociation prendra notamment en compte un ou plusieurs indicateurs des prix des produits agricoles ou alimentaires visés par le nouveau projet d’article L. 631-24 du Code de commerce évoqué ci-avant, le cas échéant définis par accords interprofessionnels.
Enfin, le délai de renégociation est ramené de deux à un mois et une procédure de médiation préalablement à toute saisine du juge est imposée à défaut d’accord sur la renégociation des prix, sauf recours à l'arbitrage.
- Relations entre les coopératives et les associés coopérateurs
L’article 8 du Projet de loi habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi tendant à modifier le code rural et de la pêche maritime afin, notamment, d’adapter les dispositions relatives aux relations entre les sociétés coopératives agricoles et leurs associés coopérateurs.
Il s’agira ainsi pour le Gouvernement de définir les conditions de départ des associés coopérateurs, améliorer leur information, renforcer la transparence dans la redistribution des gains des coopératives à leurs associés coopérateurs et prévoir des modalités de contrôle et des sanctions permettant d’assurer l’application effective de ces dispositions.
- Une refonte des règles sur les pratiques restrictives
En dernier lieu, le Projet de Loi habilite le Gouvernement à apporter par voie d’ordonnance diverses modifications et clarifications du titre IV du livre IV du Code de commerce (intitulé « De la liberté des prix et de la concurrence »), lequel comporte en effet des dispositions qui, bien qu’ayant démontré leur nécessité, sont nombreuses et parfois complexes.
Seraient notamment visés les articles :
- L. 441-3 du Code de commerce, concernant les règles de facturation, en vue de les harmoniser avec les dispositions du code général des impôts et modifier en conséquence les sanctions relatives aux manquements à ces règles.
A cet égard, les mesures adoptées pourraient par exemple permettre de préciser la date de réalisation de la vente pour le calcul des délais d’émission de la facture, selon qu’il s’agit d’une livraison de bien ou d’une prestation de service, ou encore d’harmoniser cet article avec les dispositions du Code général des impôts en précisant la faculté du recours aux factures électroniques et dématérialisées.
- L. 441-6 du Code de commerce, concernant les conditions générales de vente, afin d’en préciser les dispositions et mettre en cohérence les règles relatives aux produits agricoles et alimentaires, en particulier sur les références applicables aux critères et modalités de détermination des prix, avec les dispositions du Code rural et de la pêche maritime.
- L. 441-7 du Code de commerce, concernant les conventions uniques conclues entre les fournisseurs et les distributeurs ou les prestataires de service et entre les fournisseurs et les grossistes, afin de préciser notamment le régime des avenants à ces conventions.
L’ordonnance pourrait également être l’occasion de clarifier certaines notions, comme celles de fournisseurs ou distributeurs, ou encore de confirmer la possibilité de faire rétroagir au 1er janvier les conditions de la convention unique négociées entre le 1er janvier et le 1er mars en prévoyant expressément une dérogation à l’interdiction de bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale, prévue à l’article L. 442-6, II, a) du Code de commerce.
- L. 442-6 du Code de commerce, concernant les pratiques restrictives de concurrence, afin notamment de simplifier et préciser les définitions de la rupture brutale de relations commerciales établies.
Le contenu de la règlementation relative à la rupture brutale de relations commerciales établies pourrait par exemple être clarifié concernant le principe du doublement du préavis en cas de distribution de produits sous marque de distributeur en renvoyant directement à l’article R. 412-47 du Code de la consommation définissant ces produits, ou encore sur l’absence de prise en compte de la reconversion de la victime dans l’évaluation de son préjudice résultant de la brutalité de la rupture.
- L. 442-9 du Code de commerce, concernant la prohibition des prix abusivement bas, dont le champ d’application devrait être redéfini et précisé.
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