Rupture brutale des relations commerciales établies et groupe de société
La relation commerciale établie au sens de l’article L. 442-1 du Code de commerce ne s’apprécie pas en prenant en compte les relations du fournisseur avec toutes les sociétés appartenant à un même groupe.
Dans un arrêt du 16 octobre 2019 (n°18-10.806), la Cour de cassation a rappelé l’étendue de la notion de relation commerciale établie pour l’application du régime de la pratique restrictive de rupture brutale des relations commerciales prévue par l’article L. 442-6 I 5° ancien, nouvellement L. 442-1 du Code de commerce.
Une société avait conclu plusieurs contrats avec différentes entreprises du groupe Galeries Lafayette pour l’exploitation de stands de vente au sein de magasins appartenant aux sociétés de ce groupe. Les contrats ont été résiliés par chaque société entre 2010 et 2011. Le vendeur a alors contesté la durée des préavis accordés pour rompre ces relations contractuelles. Il a donc assigné une des sociétés en cause en paiement de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies, et étendu sa demande aux ruptures intervenues avec les autres sociétés. L’ensemble des demandes du vendeur a été rejeté en 1er instance puis en appel.
Le premier moyen du pourvoi formé par le vendeur concernait le fait qu’une relation unique existerait entre l’importateur vendeur et le groupe de société. Le vendeur soutenait que « lorsque plusieurs sociétés d’un même groupe entretiennent des relations commerciales non autonomes avec un même partenaire, le délai de préavis [devait être] fixé en fonction de la durée de l’ensemble de ces relations ».
Tout d’abord sur ce point, il avançait qu’un contrat de référencement conclu entre une filiale du groupe, agissant au nom et pour le compte des autres, et le vendeur était venu remplacer les accords antérieurs entre les parties. La haute juridiction retient toutefois d’une part, que ce contrat ne visait en réalité qu’un seul magasin spécifié en annexe, et d’autre part, que des différences importantes existaient entre les différents magasins relativement, notamment, aux taux de commission disparates appliqués. La Cour en déduit que ce contrat « ne constituait [donc] pas une seule et unique convention régissant l’ensemble des relations entre [l’importateur vendeur et les différentes sociétés du groupe Galeries Lafayette] ».
Par ailleurs, la haute juridiction rappelle surtout qu’ « un groupe de sociétés, dépourvu de la personnalité morale, qui ne peut s’engager par contrat, ne peut constituer un partenaire commercial au sens de l’article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ».
En conséquence selon la Cour, l’importateur revendeur a entretenu des relations commerciales concernant plusieurs magasins avec des sociétés différentes « ayant une personnalité morale distincte et autonome, en vertu de contrats distincts comportant des conditions d’exploitation spécifiques, ne justifie pas de l’existence de la relation commerciale unique qu’elle aurait nouée avec le groupe Galeries Lafayette par l’intermédiaire des sociétés la composant ».
Enfin, la Cour de cassation écarte l’argument soulevé par l’importateur vendeur de prétendue « politique concertée » mise en place par les sociétés du groupe, dès lors qu’aucun élément caractérisant un tel fait n’était rapporté. Cela alors même qu’existait « une centrale d’achats commune, des interlocuteurs rattachés à une même direction et le fait que trois des quatre lettres concernant la résiliation des contrats soient intervenues le même jour », ces éléments étant eux-mêmes insuffisants.
Le principe d’autonomie des personnes juridiques au sein d’un groupe de société est donc rappelé ici par la Cour de cassation qui confirme de précédents arrêts d’appel ayant déjà retenu que « la notion de relations commerciales ne peut s’entendre que de relation effectivement et réellement entretenues entre des personnes morales ou physiques et que ceci exclut que ces relations puissent être appréciées de manière globale au niveau d’un groupe de personnes juridiquement distinctes les unes des autres, et indépendantes » (Cour d’appel, Paris, 22 janvier 2016, n°14/03271, voir également Cour d’appel, Paris, 21 mars 2018, n°16/06342).
Le deuxième moyen du pourvoi concernait quant à lui l’argument de l’importateur de « rupture partielle durant le préavis en raison du changement de l’environnement d’un stand au sein d’un des quatre magasins » et de baisse de son chiffre d’affaires. La Cour de cassation écarte toutefois également ce point en indiquant que la société en charge du magasin (i) « se devait d’optimiser l’allocation de ses surfaces de ventes », (ii) « ne s’était nullement engagée à ne pas modifier l’environnement du stand » et (iii) qu’au surplus, il avait été proposé pendant le préavis au vendeur un nouvel emplacement « d’une commercialité supérieure avec une surface inférieure ». Ainsi, la Cour retient que les conditions d’exécution des contrats n’avaient pas été substantiellement modifiées durant le préavis.
Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 octobre 2019, 18-10.806
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