mardi 7 mai 2024

L’agent commercial ou apporteur d’affaires

Un intermédiaire qui se contente de mettre en relation des sociétés utilisatrices de bois avec la société vendeuse de bois, qui renseigne et conseille ses clients et qui organise des déplacements, occupe un rôle au profit de ses clients et non en qualité d'agent mandaté par la société.  

  

Une société d'exploitation forestière et de négoce de bois a versé différentes commissions entre 2009 et 2018 à une personne l’assistant dans la vente de ses produits. 

Lorsque la société a mis fin aux relations, cette personne l’a assignée en justice se prévalant du statut d’agent commercial et demandant le versement de l’indemnité de rupture et l’indemnité compensatrice de préavis. 

Le tribunal de commerce de Saint-Quentin l’a débouté de ses demandes. 

En appel, le demandeur a réitéré sa demande de requalification en agent commercial aux motifs que :  

- il exerçait cette activité sous la forme d'entrepreneur individuel depuis 1995 et qu'il était immatriculé au registre spécial des agents commerciaux ; 

- il ne s'est pas contenté de mettre en relation vendeurs et acheteurs comme un simple apporteur d'affaires ou courtier et il s'est comporté comme un agent commercial dans le cadre d'un mandat d'intérêt commun, car son entremise lui permettait de recevoir des commissions de la société et il appartenait à cette dernière de développer son chiffre d'affaires ; 

- par son intermédiation il a créé une part de marché qui a généré au profit de la société un important chiffre d'affaires, qu'il faisait remonter les doléances des clients et qu’il gérait les commandes. Il précise à cet effet qu'il organisait des réunions d'achat de produits et qu'il conseillait les clients lorsqu'ils se déplaçaient au siège de la société. 

La société considérait au contraire que : 

- il s'agissait d'un simple apporteur d'affaires ou courtier dans la mesure où il permettait à ses clients par son intervention de se fournir en bois de qualité auprès d'elle et qu'en contrepartie elle lui versait des commissions pour rétribuer cet apport d'affaires ; 

- il n'avait jamais revendiqué l'établissement d'un contrat écrit ni le statut d'agent commercial avant la fin de leurs relations d'affaires, que son inscription en qualité d'agent commercial était périmée  

- il n'a jamais été investi d'une mission de négociation et/ou de représentation exercée de façon permanente, qu’il n'a jamais été chargée de prospecter de façon continue de nouveaux clients et de négocier des ventes de façon permanente pour de nouveaux clients ; 

- enfin il disposait d'une clientèle propre. 


La Cour d’appel d’Amiens confirme le jugement du Tribunal de commerce. 

La Cour rappelle les termes de l'article L.134-1 du code de commerce, selon lequel l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux.  

La Cour rappelle ensuite la jurisprudence de la CJUE du 4 juin 2020, Trendsetteuse (C-828/18, points 33 et 34), laquelle précise que les tâches principales d'un agent commercial consistent à apporter de nouveaux clients au commettant et à développer les opérations avec les clients existants et que l'accomplissement de ces tâches peut être assuré par l'agent commercial au moyen d'actions d'information et de conseil ainsi que de discussions, qui sont de nature à favoriser la conclusion de l'opération de vente des marchandises pour le compte du commettant, même si l'agent commercial ne dispose pas de la faculté de modifier les prix desdites marchandises. Il résulte de la généralité de ces termes qu'il n'est pas nécessaire de disposer de la faculté de modifier les conditions des contrats conclus par le commettant pour être agent commercial.  

Dès lors, doit être qualifié d'agent commercial le mandataire qui est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, quoiqu'il ne dispose pas du pouvoir de modifier les prix de ces produits ou services. 

En l’espèce, à défaut de contrat écrit, il appartenait au demandeur de démontrer l'existence des critères susceptibles de permettre au juge de caractériser l'existence de ce statut dans les termes de la définition précitée : 

- Le demandeur produisait à cet effet des bordereaux de cubage renseignant sur le volume vendu aux clients et lui permettant d'émettre sa facture de commissions pour l'entremise. Selon la Cour, il ne démontre pas avoir négocié pour le compte de la société ces volumes ni que ces commandes sont la conséquence d'un démarchage commercial de clients potentiels pour leur proposer des produits adaptés à leurs besoins. En outre ces bordereaux ne concernaient qu’une partie de la période concernée ; 


- Le demandeur produisait aussi de nombreux emails pour tenter de prouver le suivi de commandes, mais ces emails étaient en anglais et en espagnols, non traduits, et les rares pièces en français ne laissaient pas apparaitre le nom de la société mandante, et ne caractérisaient pas des suivis de commande et d’offres commerciales ; 


- Le demandeur ne prouvait pas le modus operandi mis en place pour négocier pour le compte de la société des contrats de vente et d'achat de bois. Il ne produisait aucune pièce démontrant qu'il a proposé des produits, des volumes et des prix à différents clients et qu'il a retransmis à la société les demandes issues de ces négociations. 

En conclusion, la Cour considère que le demandeur se contentait de mettre en relation des sociétés utilisatrices de bois avec la société vendeuse de bois, qu'il renseignait ses clients sur les essences les cubages et les prix disponibles, qu'il organisait des déplacements sur les lieux d'exploitation et conseillait ses clients sur les choix de grumes, il occupait donc un rôle au profit de ses clients et non en qualité d'agent mandaté par la société. Ainsi il n'a pas le statut d'agent commercial ne peut prétendre au paiement de sommes consécutives à la rupture d'un tel contrat.  

Cour d’appel Amiens, 12 octobre 2023, n° 22/00585 

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