vendredi 22 novembre 2024
Face à la cessation de leur relation commerciale, le fournisseur a entendu contester la validité de certains articles des conventions annuelles 2016 et 2017 en se fondant sur l'article L. 442-6 I 1° du Code de commerce, alors applicable, en soutenant que les services décrits étaient fictifs.
Dans ce cadre, la Cour d’appel de Paris a eu l’occasion de préciser les points suivants :
1. Le domaine matériel de l'article L. 442-6 I 1° du code de commerce ;
2. La répartition de la charge probatoire dans un litige fondé sur l'article L. 442-6 I 1° du code de commerce ;
S’agissant du domaine matériel de l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce, la Cour constate que « la lettre du texte permet par la grande généralité de ses termes d’étendre son application au-delà des seuls services de coopération commerciale (« service commercial ») et à un avantage de toute nature (« un avantage quelconque »). ».
En effet, selon la Cour de cassation :
- « l’application de l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce exige seulement que soit constatée l’obtention d’un avantage quelconque ou la tentative d’obtention d’un tel avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, quelle que soit la nature de cet avantage » (Cass. Com., 11 janvier 2023, n°21-11.163) ;
- « le service donnant lieu à rémunération dans le cadre d’une convention commerciale doit être spécifique et aller au-delà des simples obligations résultant des opérations d’achat et de vente en donnant au fournisseur un avantage particulier de nature à faciliter la commercialisation des produits » (Cass. Com., 26 septembre 2018, n°17-10.173).
Par cet arrêt, la chambre 5-4 de la Cour d’appel de Paris s’aligne ainsi à la position tenue par la Cour de cassation et semble rectifier le tir après un arrêt surprenant rendu par la chambre 5-5 de la Cour d’appel de Paris qui était venu semer le trouble sur le domaine d’application de l’avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné (v. CA Paris, 5-5, 11 mai 2023, n°20/04679).
En résumé, l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce s’applique aux services et avantages de toute nature dès lors que :
- Le service est spécifique ;
- Le service va au-delà des simples obligations résultant des obligations d’achats et de ventes ;
- Le service donne au fournisseur un avantage particulier de nature à faciliter la commercialisation des produits.
En revanche, la cour d’appel ne s’aventure pas à analyser plus précisément la nature des services pouvant donner lieu à rémunération au regard de l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce. Une telle analyse aurait néanmoins été particulièrement intéressante du fait que la présente espèce portait notamment sur des services de centrale.
Le débat doctrinal est ouvert.
S’agissant de la répartition de la charge de la preuve, la Cour rappelle conformément à l’article 1353 du Code civil, qu’il incombe au fournisseur de prouver qu'une contrepartie a été versée mais qu’il incombe au distributeur de démontrer qu’un service a effectivement été rendu.
Cette solution s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence constante sur la mécanique probatoire (Cass. Com., 3 mars 2021, n°19-13.533).
A cet égard, le seul paiement des factures par le fournisseur est insuffisant, de même que l’absence de contestation pendant plusieurs années dès lors que la demande n’est pas prescrite, surtout lorsque le libellé des factures est général et ne fournit aucune précision sur les prestations fournies.
Par ailleurs, la Cour précise qu’il importe peu que le distributeur « ne soit plus en possession des justificatifs qui seraient détenus par sa société mère, dès lors qu’il lui appartenait de conserver les justificatifs [des services effectivement rendus] ou d’en obtenir la production ».
Cet arrêt souligne l'importance pour le distributeur de conserver soigneusement toutes les preuves liées à ses relations commerciales, même en cas de mouvements capitalistiques ou de changements dans la structure de l'entreprise. La conservation des documents est essentielle pour répondre à d'éventuelles réclamations ultérieures.
Nous recommandons en outre aux distributeurs de documenter de manière exhaustive toutes les opérations commerciales réalisées. Une documentation complète renforcera la crédibilité et la capacité à démontrer la réalité des services fournis en cas de litige.
(Cour d’appel de Paris, 5-4, 6 septembre 2023, n°21/19954)
Appréciation et charge de la preuve de l’avantage sans contrepartie
L’article L. 442-6 I 1° du code de commerce s’applique au-delà des seuls services de coopération commerciale et à tout type d’avantage. Lors d’un litige concernant un avantage sans contrepartie, la preuve du versement de la contrepartie incombe au fournisseur et celle de la réalité des services rendus au distributeur.
La présente affaire oppose la société Franprix Leader Price Holding, venant aux droits de la société DBA (« le distributeur ») et la société Le Roy Muribane, fournisseur de produits frais à destination des supermarchés Leader Price (« le fournisseur ») sur la notion d’avantage sans contrepartie dans le cadre des relations de la grande distribution. Pendant plus de 20 ans, les parties ont conclu des conventions annuelles détaillant les rémunérations pour les services fournis par le fournisseur.Face à la cessation de leur relation commerciale, le fournisseur a entendu contester la validité de certains articles des conventions annuelles 2016 et 2017 en se fondant sur l'article L. 442-6 I 1° du Code de commerce, alors applicable, en soutenant que les services décrits étaient fictifs.
Dans ce cadre, la Cour d’appel de Paris a eu l’occasion de préciser les points suivants :
1. Le domaine matériel de l'article L. 442-6 I 1° du code de commerce ;
2. La répartition de la charge probatoire dans un litige fondé sur l'article L. 442-6 I 1° du code de commerce ;
S’agissant du domaine matériel de l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce, la Cour constate que « la lettre du texte permet par la grande généralité de ses termes d’étendre son application au-delà des seuls services de coopération commerciale (« service commercial ») et à un avantage de toute nature (« un avantage quelconque »). ».
En effet, selon la Cour de cassation :
- « l’application de l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce exige seulement que soit constatée l’obtention d’un avantage quelconque ou la tentative d’obtention d’un tel avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, quelle que soit la nature de cet avantage » (Cass. Com., 11 janvier 2023, n°21-11.163) ;
- « le service donnant lieu à rémunération dans le cadre d’une convention commerciale doit être spécifique et aller au-delà des simples obligations résultant des opérations d’achat et de vente en donnant au fournisseur un avantage particulier de nature à faciliter la commercialisation des produits » (Cass. Com., 26 septembre 2018, n°17-10.173).
Par cet arrêt, la chambre 5-4 de la Cour d’appel de Paris s’aligne ainsi à la position tenue par la Cour de cassation et semble rectifier le tir après un arrêt surprenant rendu par la chambre 5-5 de la Cour d’appel de Paris qui était venu semer le trouble sur le domaine d’application de l’avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné (v. CA Paris, 5-5, 11 mai 2023, n°20/04679).
En résumé, l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce s’applique aux services et avantages de toute nature dès lors que :
- Le service est spécifique ;
- Le service va au-delà des simples obligations résultant des obligations d’achats et de ventes ;
- Le service donne au fournisseur un avantage particulier de nature à faciliter la commercialisation des produits.
En revanche, la cour d’appel ne s’aventure pas à analyser plus précisément la nature des services pouvant donner lieu à rémunération au regard de l’article L. 442-6 I 1° du code de commerce. Une telle analyse aurait néanmoins été particulièrement intéressante du fait que la présente espèce portait notamment sur des services de centrale.
Le débat doctrinal est ouvert.
S’agissant de la répartition de la charge de la preuve, la Cour rappelle conformément à l’article 1353 du Code civil, qu’il incombe au fournisseur de prouver qu'une contrepartie a été versée mais qu’il incombe au distributeur de démontrer qu’un service a effectivement été rendu.
Cette solution s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence constante sur la mécanique probatoire (Cass. Com., 3 mars 2021, n°19-13.533).
A cet égard, le seul paiement des factures par le fournisseur est insuffisant, de même que l’absence de contestation pendant plusieurs années dès lors que la demande n’est pas prescrite, surtout lorsque le libellé des factures est général et ne fournit aucune précision sur les prestations fournies.
Par ailleurs, la Cour précise qu’il importe peu que le distributeur « ne soit plus en possession des justificatifs qui seraient détenus par sa société mère, dès lors qu’il lui appartenait de conserver les justificatifs [des services effectivement rendus] ou d’en obtenir la production ».
Cet arrêt souligne l'importance pour le distributeur de conserver soigneusement toutes les preuves liées à ses relations commerciales, même en cas de mouvements capitalistiques ou de changements dans la structure de l'entreprise. La conservation des documents est essentielle pour répondre à d'éventuelles réclamations ultérieures.
Nous recommandons en outre aux distributeurs de documenter de manière exhaustive toutes les opérations commerciales réalisées. Une documentation complète renforcera la crédibilité et la capacité à démontrer la réalité des services fournis en cas de litige.
(Cour d’appel de Paris, 5-4, 6 septembre 2023, n°21/19954)
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