Focus sur l’appréciation du caractère trompeur des allégations de mise en avant des denrées alimentaires
mercredi 5 février 2025

Focus sur l’appréciation du caractère trompeur des allégations de mise en avant des denrées alimentaires

Le 16 janvier 2025, le Tribunal correctionnel de Bordeaux a condamné BAILLARDRAN pour mise en avant trompeuse de la fraicheur de ses cannelés, du mode de fabrication de ses produits et des qualités substantielles des ingrédients.  

Dans le cadre de cette affaire, la maison BAILLARDRAN, connue pour la fabrication de cannelés, a fait l’objet d’un contrôle par les services de la DPPP sur la période du 1er février 2023 au 31 juillet 2024, à l’issu duquel un procès-verbal a été dressé pour caractériser la réalisation d’actes trompeurs pour le consommateur, ayant donné lieu à une condamnation par le Tribunal correctionnel de Bordeaux le 16 janvier 2025.  

L’étude de ce jugement réside dans le rappel du cadre normatif s’appliquant à l’appréciation du caractère trompeur d’une allégation portant sur la fraîcheur d’une denrée alimentaire, d’une allégation portant sur le caractère naturel de l’ingrédient ou d’informations portant sur la composition de la denrée alimentaire.  

Tout d’abord, il est rappelé que l’utilisation de l’allégation « frais » ou la mise en avant de la fraicheur d’une denrée alimentaire n’est pas réglementairement définie pour l’ensemble des denrées alimentaires.  

Néanmoins, le Conseil national de la consommation (CNC) a apporté trois conditions pour admettre l’utilisation du terme « frais » à propos d’une denrée alimentaire :  

  • La denrée alimentaire doit avoir conservée ses caractéristiques essentielles, notamment organoleptiques, qui sont présentes au moment de la fabrication, 
  • La denrée ne doit pas avoir été conservée grâce à l’emploi d’un traitement ou à l’addition de toute substance destinée à stopper l’activité des enzymes et de la microflore, exception faite de la réfrigération, et dans certain cas de la pasteurisation. 
  • Avoir été produite depuis moins de 30 jours  

Les conditions posées par le CNC sont donc incompatibles avec la congélation de la denrée alimentaire.  

En l’espèce, il ressort du jugement du 16 janvier 2025, que les enquêtrices ont constaté dans les locaux de l’entreprise, une quantité importante de cannelés dans des congélateurs. Les enquêtrices ont pu constater que des cannelés décongelés ont été vendus aux consommateurs alors même que l’établissement porte des allégations sur la fraîcheur de ses produits avec parfois la mention « frais du jour ». Il apparaît que le terme « frais » est mentionné sur des boîtes d’emballage et sur le site internet à 16 reprises. Cette allégation figure également sur différents supports de communication. 

S’agissant spécifiquement de l’allégation portant sur la fraîcheur des ingrédients employés, les enquêtrices ont relevé :  

  • L’usage de jaunes d’œufs liquides sucrés pasteurisés mélangés à du sucre 
  • De la vanille épuisée dépourvue de propriétés organoleptiques, 
  • De la vanille en poudre séchée et broyée, 
  • De l’arôme vanille qui est un produit industriel contenant des arômes de synthèse
  • Du lait en poudre contenant trois additifs 
  • De la farine dont la traçabilité ne permet pas de démontrer que le meulage est intervenu dans le délai de 30 jours avant son utilisation  

Au regard de ces constatations, le jugement a donc considéré que l’allégation portant sur la fraîcheur de la denrée alimentaire et ses ingrédients est trompeuse à l’égard du consommateur.  

Ensuite, s’agissant de la mise en avant du caractère « naturel » d’un ingrédient, il est rappelé que la DGCCRF a communiqué une note n°2009-136 visant à préciser le cadre de l’emploi de ce terme.  

La DGCCRF considère que l’emploi du terme « naturel » est adapté aux produits provenant de la nature et présentées au consommateur en l’état ou après une transformation mécanique n’entrainant pas de modification profonde (ingrédients parés, tranchés, hachés, épluchés, moulus, broyés, décortiqués, séchés, pressés…).  

La DGCCRF précise que lorsque le produit a éventuellement subi une stabilisation (par le froid, chaleur ou conditionnement) , une cuisson, une fermentation, un emprésurage, une torréfaction ou infusion, il est recommandé d’utiliser l’allégation « d’origine naturelle » plutôt que « naturel ».  

En l’espèce, il apparaît que la mise en avant du caractère naturel et noble des ingrédients n’était pas conforme aux véritables qualités des ingrédients employés dans la fabrication des canelés. En effet, les constatations des enquêtrices relèvent la présence d’additifs et d’arômes de synthèses dans les ingrédients employés, alors que la communication de la société BAILLARDRAN est axée sur l’utilisation de matières nobles telles que le rhum brun et la vanille bourbon.  

Enfin, les constatations des enquêtrices relèvent également une discordance entre la liste des ingrédients figurant sur les emballages des cannelés et la liste les ingrédients effectivement employés dans le processus de fabrication des canelés.  

Pour rappel, la liste des ingrédients doit figurer, de manière loyale et précise, sur l’emballage par ordre d'importance pondérale décroissante (y compris les additifs et les arômes). Les ingrédients allergènes doivent être mentionnés et mis en relief. 

A titre d’illustration, le jugement relève que l’utilisation de lait et de beurre est ventée, alors que seul du lait en poudre est utilisé, le beurre étant totalement exclu du processus de fabrication. 

Par ailleurs, les enquêtrices dénoncent l’amplification du caractère trompeur sur la gamme des canelés « pur vanille » résultant de l’apposition d’une image de vanille fraîche sur l’emballage des canelés et sur des affiches placardées en boutique, alors que de la vanille en poudre était utilisée pour la fabrication des canelés « pur vanille ».  

Pour conclure, le tribunal correctionnel de Bordeaux a donc conclu au caractère trompeur des pratiques relevées, prononçant une condamnation à hauteur de 100 000 euros.  

Il est rappelé qu’au sens de l’article L132-2 du code de la consommation, les pratiques commerciales trompeuses peuvent être sanctionnées par une amende de 300 000 euros et une peine d’emprisonnement de deux ans.  

Depuis le 12 mai 2024, cet article prévoit que la peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende en présence d’une infraction commise par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique.

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