Possibilité de contrôle de la légalité des avis, recommandations, mises en garde et prises de positions de l’Autorité de la concurrence
Les avis, recommandations, mises en garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation pourront désormais être déférés au juge de l’excès de pouvoir […] lorsqu'ils sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou ont pour objet d'influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s'adressent.
Par une délibération de la commission permanente de l'Autorité de la concurrence du 23 mars 2015, dont le Président de l’Autorité a notifié le contenu à Numericable par lettre du 31 mars 2015, l’Autorité a relevé que la décision prise par la nouvelle entité issue de l'opération de concentration entre SFR et le groupe Altice de fusionner les plateformes propriétaires de Numericable et de SFR, proposant ainsi CanalSat en auto-distribution à une partie de ses abonnés, avait eu pour effet de supprimer, sur cette nouvelle plateforme fusionnée, le risque d'éviction de Numericable.
Dans sa lettre du 31 mars 2015 adressée à Numericable, elle a donc considéré que les considérations des décisions n° 12-DCC-100 et 13-DAG-01 ayant pour effet de prévenir l'acquisition par le Groupe Canal Plus de droits exclusifs de diffusion sur la plateforme câblée de Numericable étaient donc désormais sans objet.
La société Numericable, contestant la position adoptée par l’Autorité de la concurrence, saisie le juge administratif pour solliciter l’annulation de la délibération de la commission permanente de l’Autorité de la concurrence du 23 mars 2015 et de la lettre qui lui a été adressée le 31 mars 2015.
Aux termes d’un arrêt rendu le 21 mars 2016 (n°390023), le Conseil d’Etat a posé le principe selon lequel :
« les avis, recommandations, mises en garde et prises de position adoptés par les autorités de régulation dans l'exercice des missions dont elles sont investies, peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils revêtent le caractère de dispositions générales et impératives ou lorsqu'ils énoncent des prescriptions individuelles dont ces autorités pourraient ultérieurement censurer la méconnaissance ; que ces actes peuvent également faire l'objet d'un tel recours, introduit par un requérant justifiant d'un intérêt direct et certain à leur annulation, lorsqu'ils sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou ont pour objet d'influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s'adressent ; que, dans ce dernier cas, il appartient au juge, saisi de moyens en ce sens, d'examiner les vices susceptibles d'affecter la légalité de ces actes en tenant compte de leur nature et de leurs caractéristiques, ainsi que du pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité de régulation ; qu'il lui appartient également, si des conclusions lui sont présentées à cette fin, de faire usage des pouvoirs d'injonction qu'il tient du titre Ier du livre IX du code de justice administrative ».
En l’espèce, le Conseil d’Etat a considéré que la prise de position adoptée par l'Autorité de la concurrence le 23 mars 2015 ayant pour effet, en reconnaissant à GCP la possibilité d'acquérir des droits de distribution exclusive sur la plateforme de Numericable, de lui permettre de concurrencer Numericable sur sa plateforme, était de nature « à avoir des effets économiques notables ; qu'elle a, en outre, pour objet de modifier le comportement des opérateurs sur le marché de l'acquisition de droits de distribution de chaînes de télévision ». Il a ainsi estimé que la délibération attaquée faisant grief à Numericable, son recours était recevable.
Le principe posé par le Conseil d’Etat constitue une avancée majeure : les avis, recommandations, mises en garde et prises de position, adoptés par les autorités de régulation dans l'exercice des missions dont elles sont investies, pourront être déférés au juge de l'excès de pouvoir.
Un contrôle de la légalité des avis, recommandations, mises en garde et prises de positions adoptés par les autorités de régulation sera désormais possible.
Les entreprises pourront donc exercer un recours pour excès de pouvoir devant les juridictions administratives contre les divers textes de « doctrine » de l’Autorité de la concurrence, notamment les avis sur saisine d’office de cette dernière, ce qui était refusé jusqu’à aujourd’hui.
Cet arrêt est à rapprocher de celui rendu le même jour par le Conseil d’Etat (n° 368082).
Aux termes de cet arrêt, le Conseil d’Etat a posé le même principe et considéré qu’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation de communiqués publiés par l’Autorité des marchés financiers mettant les investisseurs en garde contre les conditions dans lesquelles sont commercialisés certains produits de placement, était recevable.
Nous vous invitons à lire ici notre page sur la gestion du renouvellement du bail.
Conseil d’Etat, 21 mars 2016, n° 390023 Société NC Numericable.
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