La démonstration de l’originalité
Le seul fait qu’un document ait été rédigé par un écrivain renommé ne suffit pas à lui conférer une originalité permettant de la considérer comme une œuvre.
Nous avions précédemment abordé le risque d’irrecevabilité d’une action en contrefaçon de droits d’auteur du fait de preuve du caractère original de l’œuvre.
Une nouvelle décision du Tribunal de Grande Instance de Paris, rendue le 8 septembre dernier dans le cadre d’une affaire concernant l’écrivain Michel Houellebecq, est venue mettre particulièrement en lumière cette nécessité d’une démonstration du caractère original de chacune des œuvres dont on prétend être l’auteur.
Rappelons le principe : il appartient à celui qui se prévaut de la qualité d’auteur d’une œuvre de démontrer qu’il en est bien l’auteur mais également que l’œuvre remplit les conditions pour bénéficier de la protection au titre des droits d’auteur.
Or, sur le fondement de l’article L.112-2 du Code de la propriété intellectuelle et de la jurisprudence, constante, il est indispensable que l'œuvre revête le caractère d'une création originale, et traduise à cet égard l’empreinte de la personnalité de son auteur. Une œuvre est ainsi considérée comme originale lorsqu’elle « porte la pâte du créateur, son style, sa façon personnelle de voir et de concevoir », autrement dit l’empreinte de sa personnalité (Laure Marino, Droit de la propriété intellectuelle, Thémis Droit, PUF, 2013, p. 181).
L’originalité est également entendue comme la marque de l’apport intellectuel de l’auteur. Cette expression fait référence aux choix de l’auteur. La jurisprudence fait ainsi souvent référence à l’expression des choix libres et créatifs de l’auteur, choix qui traduisent la capacité créative de l’auteur.
Dans cette affaire, le journal Le Monde avait consacré une série d’articles à Michel Houellebecq. L’un d’eux relatait un procès dans lequel était impliqué l’écrivain et reproduisait un mot manuscrit remis par l’écrivain à son avocat, sur lequel était écrit : « Ma décision est irrévocable : les médias, pour moi, c’est fini. »
L’écrivain a assigné la société éditrice du Monde, en se fondant en particulier sur la violation de ses droits d’auteurs et plus spécifiquement de ses droits de divulgation et de reproduction. La société éditrice contestait l’originalité du mot litigieux et par conséquence, la possibilité pour Michel Houellebecq de bénéficier de la protection des droits d’auteur.
Le tribunal, après avoir souligné que ce mot pouvait être protégé comme œuvre au sens de l’article L.111-1 du Code de la propriété intellectuelle, s’apparentant à une lettre missive, considère que Michel Houellebecq ne fait pas la démonstration de cette originalité. Michel Houellebecq s’était en effet contenté d’indiquer qu’il s’agissait d’une lettre missive « dont la composition structurée, servie par un style propre à l’auteur, porte son empreinte et reflète sa personnalité. » Il ne caractérisait pas en quoi ce mot portait l’empreinte de sa personnalité. Le tribunal indique que le seul fait que le mot en question ait été rédigé par « un écrivain dont la renommée n’est pas en cause, ne peut suffire à lui conférer une originalité ».
Le tribunal a dans ce jugement développé les raisons qui fondent cette exigence de démonstration de l’originalité par l’auteur en précisant que « seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole ». Il ajoute que « le principe de la contradiction (…) commande que le défendeur puisse connaitre précisément les caractéristiques qui fondent l’atteinte qui lui est imputée et apporter la preuve qui lui incombe de l’absence d’originalité ».
En droit, la qualité d’auteur, et la démonstration de celle-ci, doit donc être réalisée pour chaque œuvre dont on se prétend l’auteur, indépendamment de tout ce qui a pu être créé par ailleurs.
TGI Paris, 8 septembre 2016, RG n°15/14682
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